Samedi 22 mai 2006.
Après un vol sans encombre et quelques vues du ciel dans la tête, tout a commencé, je dois l'avouer, par une bouffée d'angoisse, quand je n'ai pas vu H. dans le hall de l'aéroport. Cela n'a pas duré longtemps. Sa voix au téléphone m'a rapidement rassuré.
Je le guettais à travers les vitres de l'aérogare. Quand il a paru, je l'ai reconnu de suite. Bonheur de le voir, de l'embrasser et de le serrer dans mes bras. Passage du virtuel au réel. Aucune déception. Du bonheur.
Passées les démarches en vue de la remise des clés de "notre chez nous", nos corps n'ont pas tardé à se découvrir en même temps que nos coeurs parlaient.
Petite faim: nous irons manger un panini au "Dix-30". Mon Dieu qu'il fait chaud dans la mezzanine (le temps est à l'orage). Je supplie pour redescendre en terrasse. Et j'oublie mes lunettes sur la table ... Un charmant jeune homme me les apporte gentiment. Je ne cesserai de découvrir, tout au long de ce séjour, à quel point les marocains sont gentils, surtout avec les étrangers.
H. m'emmène ensuite à travers les larges avenues de la ville nouvelle, de fontaine en fontaine, jusqu'aux portes (plus précisément une porte) de la Medina. Première plongée dans ces ruelles grouillantes de monde, où l'on voit les artisans travailler, les étals donner envie, les parfums et les couleurs se succéder. Nous découvrons alors la Medina "par le haut".
Sortis du dédale de la Medina, nous nous asseyons au bord d'une grande place face aux remparts et nous parlons. Haro sur les anti-dépresseurs! On n'a plus besoin d'anti-dépresseur quand on se sent aimé.
Première visite au Titanic pour une première salade. Nous y retournerons ensuite.
La nuit qui suivra réunira nos deux corps: le sien, sec, musclé, bronzé; le mien, ...? Nous n'avons pas dû chercher longtemps les positions, les attitudes qui nous font du bien, nous apaisent. Elles sont venues spontanément. Doux moments d'intimité.
Dimanche 23 mai 2006.
Nous n'avons pas mis de réveil et voilà le résultat! Après quelques câlins matinaux, nous nous retrouvons à une heure pas possible pour notre premier petit déjeuner.
Direction la Medina "par le bas", cette fois. Nous nous arrêtons dans un quartier animé et populaire. "Es salam alèkhoum". "Merhaba = bienvenue". "Le Maroc est ton deuxième pays, sidi". Je ne suis pas dupe: ces souhaits avaient pour but de m'amadouer et m'entendre dire que je cherchais un guide pour parcourir le dédale de la Medina; or, j'avais déjà un guide et quel guide! Cela fait quand même plaisir à entendre.
Notre périple nous conduira dans deux étapes que je n'oublierai pas:
- sur une toute petite place, une vieille échoppe avec un vieux monsieur. Nous y boirons le meilleur jus d'orange du séjour, puis un thé. Le tenancier nous expliquera que, avant lui, son père, et avant lui, son grand-père tenaient déjà le lieu. Depuis 105 ans, en fait. Le roi y a même fait escale. Touchante étape;
- j'ai été irrésistiblement attiré par une petite boutique où l'on vendait parfums, herbes, potions, huiles essentielles. Le jeune tenancier connaissait bien son affaire et m'a vanté les mérites de ses articles. Le plus bluffant: l'anis noir que l'on sniffe pour lutter contre le ronflement, pour soulager les voies respiratoires et qui est, en plus, légèrement aphrodisiaque. Je repartirai aussi avec des pétales de rose, du patchouli et, en cadeau, le cure-dent local.
J'ai appris ce qu'était le bleu de Fes. Et nous avons acheté aussi à une très pauvre dame chacun une paire de brosses à cheveux comme on n'en trouve pas en Belgique. Qu'il est difficile alors d'offrir le "juste prix"!
Pour rejoindre la voiture, nous nous sommes un peu perdus dans le labyrinthe de la Medina. Mais il est vrai qu'on finit toujours par en sortir. Peu importe la porte. Finalement, c'est un peu comme lorsqu'il s'agit d'entrer au paradis. La porte alors importe peu.
Et un thé, encore un, sur la terrasse d'un café (j'ai bien dit "sur la terrasse" et non "en terrasse"). Nous cherchions toujours où faire nos courses: de l'eau, une brosse à dents, du papier Q. Un seul regret: je n'ai pas pu goûter le lait d'amande promis. Mais la présence de H. était aussi douce que le lait d'amande.
On m'avait dit tant de bien de la cuisine marocaine ... Il est vrai que l'exception confirme la règle. L'exception: un restaurant marocain d'un grand boulevard. Lui, tajine aux boulettes de kefta: soit 5 minuscules boulettes dans du concentré de tomates. Moi, tajine de veau aux pruneaux: il s'agissait bien de pruneaux, mais ce n'était pas du veau. Heureusement, la salade marocaine était délicieuse.
Lundi 24 mai 2006.
Après une grasse mais tendre matinée, nous rejoignons Meknes. Nous n'y resterons guère. Nous y reviendrons un jour peut-être. Il y avait beaucoup à découvrir pourtant à en croire mon guide. Je n'insisterai pas et ne le regretterai pas.
Nous prenons une collation sur la grande place, puis nous rejoignons à travers une très belle campagne le site de Volubilis, cité romaine des 2ème et 3ème siècles. C'est la fin de l'après-midi. La lumière est belle malgré le ciel nuageux. Les pierres parlent. Les fleurs nous accompagnent. Nous multiplions les photos. H. saute, fait de l'escalade de ruines ... C'est un très beau moment. Je retiens particulièrement la maison dite "maison de l'éphèbe"; et pour cause l'éphèbe était là, je l'ai photographié.
Bien décidés à ne pas réitérer l'expérience désastreuse de la veille, nous renonçons aux tajines et leur préférons la pizza.
Mardi 25 mai 2010.
Dilemme: retourner dans la Medina ou pas? La première branche de l'alternative ne réjouit pas H. Nous choisissons de sillonner la région et ses campagnes. Une fois de plus, aucun regret, tant les paysages sont beaux. Nous nous arrêtons à Sidi Harazem. Une ambiance d'oasis. Une source thermale. Aucun touriste, rien que des familles venant des alentours. Nous y mangeons enfin un vrai et délicieux tajine aux légumes. Sur le chemin du retour, nous ferons une halte face au paysage ... non sans avoir accroché le bas de caisse de la voiture aux bords du ravin.
Les voitures peuvent avoir soif dans ce pays de chaleur. Les anciens le savaient bien: c'est pourquoi ils ont, non sans raison, toujours préféré à la voiture l'âne, le dromadaire ou la marche à pied. C'est fou le nombre de marcheurs que l'on peut croiser au Maroc. J'ai vu des ânes, mais point de dromadaires.
Délices de fin d'après-midi. Nous n'avons presque plus d'argent liquide, mais le peu que nous avons nous le buvons (sans alcool) à la terrasse du Central Parc Café. La verdure, la brise du soir, la douce chaleur. Dernière soirée de mon séjour.
Nous nous rejoignons au lit. Pourquoi ai-je toujours des paroles malheureuses? Quand j'ai dit "Merci pour cette belle journée", H. a pris la mouche. Nous nous sommes séparés quelques secondes. Puis il m'a dit: "Viens". Alors, j'ai souri.
H. m'avait dit que j'avais parlé pendant mon sommeil la nuit précédente. J'ai dès lors essayé de me taire.
Mercredi 26 mai 2010.
Mon réveil sonne à 6 heures. Erreur de décalage horaire. Celui de H. à 6 heures 45. Trois quart d'heures de gagné pour terminer la nuit "collés serrés", avant l'arrivée du propriétaire.
Nous rejoignons l'aéroport. Je n'aime pas les adieux. H. non plus. Pas d'effusions en public. Je franchis la porte du contrôle. Je me retourne. H. me fait un signe discret. Il porte la même chemise que le premier jour.