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jeudi 30 mai 2013

C'est gros et pourtant c'est vrai

Je ne sais pas où certains flamands démocratiquement élus, et dès lors nantis d'une légitimité, veulent conduire la Flandre. J'ai beaucoup de peine à imaginer ceux qui les soutiennent et les ont élus. Ils ne ressemblent pas aux flamands que je connais.

Un événement anodin, mais révélateur, s'est passé à Kortrijk (je n'ai pas osé écrire Courtrai, par peur de représailles). Il y a, à Kortrijk, comme dans beaucoup d'autres villes, une grand-place, qui ne s'appelle pas comme cela cependant. La grand-place de Liège s'appelle bien Saint Lambert. Peut-être s'appelle-t-elle " Guido Gezelle Plein ". Je n'ai pas eu le temps de vérifier. Un entrepreneur entreprenant, mais pas très au courant des usages flamands, peut-être était-il turc ou marocain, a choisi d'y installer une baraque à frites (un fritkot, comme on dit à Bruxelles). Pour faire chic, il présentait sa jeune entreprise sous le label " Frituur Grand Place". Il pensait naturellement à la Grand Place de Bruxelles que même les japonais appellent comme cela. Des cafés, en Wallonie, s'appellent bien, dans le même registre Elysée, Le Grand café, ou le Big Ben, pour faire chic. Cela ne gêne personne. Mais, à Kortrijk, ville flamande, cela ne va pas comme cela. Grand Place, pas question, c'est du français.

L'entrepreneur a donc été contraint par de débiles édiles à modifier l'appellation de son entreprise. Cela donne maintenant : " Frituur Grote Markt ". Génial d'autant que la place ne s'appelle pas Grote Markt ! L'allusion chic a donc disparu.

Mais pourquoi "frituur" et pas " fritenwinkel " ou " fritenkot " (pour flamandiser le brusseleir). J'ai été consulté mon  dictionnaire Van Daele. Il semble bien que, sous je ne sais quelles influences, le verbe "friteren" a évolué vers "frituren", et ses dérivés, même aux Pays-Bas. Ne parle-t-on pas, en français, d'une friture de poissons, s'agissant de petits poissons, légèrement passés à la farine, et cuits dans de l'huile bien chaude (avec juste un peu de jus de citron ou une sauce tartare ou gribiche et une petite salade, un régal). Mais, n'entend-on pas nommer, en France, " friterie " l'équivalent de nos baraques à frites ? Alors qui a raison ? Friterie, pour le lieu; friture, pour le mode de cuisson. La subtilité et la précision du français s'illustrent ici. C'est bien pourquoi le mot " frituur " est, dans le cas d'espèce aussi incongru que les mots " Grote Markt ", si on veut être un peu rigoureux. Appelons donc le résultat final "un régionalisme".

Beaucoup se sont amusés de cette affaire et du ridicule échevin qui en est à l'origine. Le personnage a encore bien du travail en perspective. Pensez au pizzeria, aux restos grecs, aux snacks pitas, aux restos chinois. " La casa della mama " devra s'appeler " Het huis van de moeder ". Le " Metaxa " s'appellera " De griekse genever " et le " De Yuan " s'appellera " Het Jan's hof ". Cela promet d'être drôle.

Cela dit ... Tiens donc, pourquoi les flamands, tellement recroquevillés sur leur identité, n'appellent-ils pas le premier ministre " de Eerste minister ", mais plutôt " de Premier " ? Et pourquoi le Parlement flamand s'appelle-t-il " Het vlaamse Parlement " ? Et pourquoi un parlementaire flamand,  s'appelle-t-il un " parlementair " plutôt qu'un " vertegenvoordiger ".

Du coup, - l'initiative vient de " Slechte vlamingen ", un groupe de flamands un peu rebelles, dont je connais un membre anversois - une invitation a été adressée à certains hommes politiques flamands afin qu'ils changent de patronyme. Ainsi, il faut contraindre Geert Bourgeois à s'appeler Geert Burger (une nouvelle variété pour chez Mac Do) ; Jan Jambon doit impérativement demander à s'appeler Jan Ham. Je vous laisse imaginer les alternatives pour les parlementaires flamands, actuels ou passés, suivants : Ingrid Coppé, Jos Dupré, Cyriel Marchand, Pierre Chevalier, Léona Detiège. Et que faire d'un parlementaire flamand qui s'appellerait Flamant (je crois que cela est déjà arrivé) ?








mardi 28 mai 2013

L'expérience de la dépendance, une voie d'accès à l'humilité


Je suis un peu à bout de nerf, avec cette succession qui n'en finit pas, les informations qui n'arrivent pas, l'inertie des uns et des autres. L'inertie de l'administration n'est pas étonnante, mais ce n'est pas mieux dans certaines banques ... notamment celle que ma mère a choisie.

Mes parents ont eu le génie de se marier sous le régime de la communauté légale et de se comporter comme s'ils étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. Chacun ses comptes, chacun son épargne, chacun ses revenus et chacun ses héritages et chacun sa banque. Allez faire comprendre à ma mère maintenant que ce qu'elle a toujours cru lui appartenir à elle seule appartenait en fait pour moitié à mon père ! Ce n'est pas le seul paradoxe financier de mes parents qui recueillaient les intérêts de leurs placements sur leurs comptes à vue, mais leurs salaires ou pensions sur leurs comptes d'épargne. Depuis le blocage des comptes, suite au décès de mon père, les deux pensions de ma mère sont ainsi versées sur un compte bloqué, tandis que le compte à vue se vide, il y a eu peu d'intérêts échus ces derniers temps. Et ma mère s'angoisse et je dois la rassurer. Quel est le banquier sournois qui leur a conseillé ce plan ?

Ah oui, j'oubliais ... Quatre mois après le décès, les comptes ne sont toujours pas débloqués au grand dam de ma mère. Les deux banques ont reçu le certificat d'hérédité établi par le notaire, il y a plus d'un mois. Dans une banque, les choses ont été réglées très rapidement. Dans l'autre, le préposé me donne, dans un premier temps, un rendez-vous, puis me téléphone pour me dire que le siège n'a pas encore donné son autorisation pour le déblocage des comptes (après trois semaines !) et que le service chargé des successions me contactera le moment venu ! J'attends toujours. Réfléchissez bien avant de choisir votre banque.

Et ceci aussi. J'ai  fait moi-même la déclaration de succession. Il faut savoir que la déclaration de succession se présente, depuis des temps immémoriaux, sous la forme d'un rectangle vide ... où des mentions nécessaires doivent figurer. On est en plein 19ème siècle. On se demande si le but n'est pas de réserver aux notaires ou à leurs clercs un office. Modernité oblige : on trouve aujourd'hui sur le site du ministère des Finances un exemplaire de la déclaration avec un guide. Je l'ai suivi. Mais, suivre le modèle proposé par le ministère des Finances ne vous met pas à l'abri de toute surprise. Ce modèle ne dit pas qu'il faut élire domicile quelque part, il demande de renseigner une adresse pour toute correspondance. Ma déclaration a été recalée parce que nulle part ne figuraient les mots "élection de domicile". J'étais prêt à faire une crise et à tordre le coup de la fonctionnaire. Déjà que la banque de ma mère m'a mis hors de moi, voilà maintenant qu'une fonctionnaire chicane. Mes arguments étaient prêts. Avez-vous connaissance des principes de bonne administration ? Savez-vous qu'il existe un principe de confiance légitime, selon lequel une information erronée de l'administration ne peut pas porter préjudice au contribuable. Cette fonctionnaire n'avait jamais entendu parler, de toute évidence, de bonne administration et de confiance légitime. Mais elle a fait preuve de souplesse. Après avoir vérifié que j'étais bien un des déclarants, elle m'a invité à ajouter manu scripto quelques mots "les héritiers faisant élection de domicile à l'adresse ci-devant nommée ". Ouf ! L'honneur est sauf !

Mais venons-en au coeur du sujet.

Voilà quatre mois que gérant la situation, faisant toutes les démarches requises, je me trouve à la merci de tiers qui détiennent le pouvoir, quand moi je n'en ai aucun. Je n'ai d'autre choix que de subir, de m'irriter, de m'angoisser à cause des délais, de renoncer à mes propres projets à cause des autres.

Dépendre des autres.

Dépendre, c'est devoir s'en remettre à quelqu'un d'autre et ne plus être à la barre.

Dépendre, c'est constater son impuissance.

Par conséquent, dépendre, c'est apprendre qu'on n'est pas tout puissant.

D'un point de vue bénédictin, il ne peut s'agir que d'une une étape dans l'humilité.

Je vous invite à un exercice : faire la liste (elle sera longue, à votre grande surprise) de tout ce dont vous êtes dépendant. On en reparlera.






dimanche 26 mai 2013

Michel Fau et miss Knife

Une petite polémique m'a opposé à certains de mes amis à propos de Michel Fau.




Michel Fau est un comédien qui a joué autant de tragédies que de comédies, écrites par les plus grands noms. Ce n'est donc pas son talent qui est en cause. Il a fait un tabac à Paris, dans divers théâtres, en incarnant une diva emphatique.







 On l'a vu, lors de la remise des Molières, il y a un an ou deux, faire grincer des dents les parents de Carla Bruni, gratuitement, dans un show assez pathétique. On l'a vu ensuite chez Laurent Ruquier, tout aussi pathétique ... Monsieur Fau est-il drôle en diva ? Certains rient et d'autres pas.

http://www.youtube.com/watch?v=MAAlxI1i0S4
http://www.youtube.com/watch?v=roiZs-fnc-c

On aime dans certains microcosmes, parisiens ou gay, et souvent les deux, crier au génie pour de tels talents. On peut rire même de leur inaptitude à faire rire. Le bouffon incapable de faire rire est bien plus drôle, n'est-il pas, que celui qui y parvient ? Quitte à ce que le rire soit un peu forcé, conditionné ... rire de certaines choses permet, c'est sûr, d'appartenir à certaines coteries. Et c'est tellement mieux de rire entouré que de ne pas rire, le cas échéant, tout seul.

Le rire suscité par les performances de Michel Fau, en emphatique diva, appelle une analyse que je suis bien incapable de faire. Quels sont les moteurs du rire ? De quoi rient ceux qu'il fait rire ?

Le travestissement met en joie certaines personnes et, à partir de là, tout devient risible pour eux. Il s'agit autant d'homos que d'hétéros, soit dit en passant. Admettons. Je ne fais pas partie de ceux-là.

Les textes de Michel Fau diva sont-ils drôles ? Non.

Sa prestation vocale est-elle drôle ? Non. Mais certains (Josiane Balasko, par exemple) rient de ses dérapages vocaux, manifestant par la-même qu'ils restent au premier degré du personnage.

Ses costumes sont-ils drôles ? Oui.

Donc, il fait rire en n'étant pas drôle. Et c'est le choix qu'il fait. En fait, il est génial, dans la mesure où les rires qu'il suscite sont toujours des rires immérités.

Appelons cela le quatrième degré.

Un tel degré n'est naturellement pas accessible au commun des mortels. Qu'est-ce qu'ils ont l'air con tous ceux qui se situent aux premier, deuxième et troisième degrés. Tout le monde ne peut pas être Josiane Balasko pour se contenter de rire au premier degré. Quant à Laurent Ruquier, il fait, avouons-le, de gros efforts pour rire de la prestation du dit Fau. Mais je ne sais pas à quel degré exactement il se situe, Laurent  Ruquier.

J'aimerais opposer, à la diva emphatique de Michel Fau, Miss Knife, alias Olivier Py. Directeur du Théâtre de l'Odéon (pendant un temps) et aux commandes pour le Festival d'Avignon.





Je n'ai pas vu sur scène Michel Fau, mais j'ai vu sur scène Olivier Py dans un spectacle Miss Knife. Ceci pour dire que je ne m'enfuis pas à la vue d'un travesti.






Dans le spectacle d'Olivier Py, épatant et émouvant, il y avait une présence en scène, de vrais textes, une vraie voix. Sans doute était-il à un degré à ma portée ?

http://www.youtube.com/watch?v=F9Sy3X_lmss




samedi 25 mai 2013

Le pâtre grec

Un homme s'est tu. Il a écrit et chanté de très belles chansons, de ces chansons qui traversent le temps ou qui nous touchent à un moment précis de notre vie. Des mots qui mènent un peu plus loin que soi-même ou rejoignent l'intimité de ce que l'on ne parvient pas à dire et qu'il dit mieux que nous. Il y avait en lui de la nonchalance (on l'a appelé monsieur 1 volt, comparé au monsieur 100.000 volts qu'était son contemporain, Gilbert Bécaud). Doc Gyneco étant à moins d'un volt !

Il avait choisi de s'appeler Georges Moustaki, ce n'était pas son vrai nom. Il nous a parlé de liberté, de solitude, de Joseph, de Judith, de Sarah, du facteur, du temps de vivre, d'un métèque qui n'était autre que lui-même ... entre autres. Il a écrit pour les autres (Milord chanté par Edith Piaf) et a été chanté par d'autres (particulièrement Serge Reggiani).

http://www.youtube.com/watch?v=bGoM7hqWU0Y
http://www.youtube.com/watch?v=QvFLBs9S8FY
http://www.youtube.com/watch?v=1LkmvFo4i5s
http://www.youtube.com/watch?v=YK9f6DPpul0
http://www.youtube.com/watch?v=k57Zbo_mnWY
http://www.youtube.com/watch?v=Nx3127maunE
http://www.youtube.com/watch?v=E_3ETycRfX0

Je l'ai beaucoup écouté au temps de ma jeunesse, puis je l'ai un peu de perdu de vue.

Non, pas tout à fait. Si je n'écoutais plus qu'épisodiquement ses chansons, je gardais en mémoire ses photos. Elles me parlaient autant que ses chansons.

Oui, ce pâtre grec me parlait autant par ses photos que ses chansons.

Je suis très sensible en effet au regard, à la physionomie, à la manière d'être des hommes ou femmes que je croise dans ma vie.

Contemplant des photos de Georges Moustaki, prises au long de sa vie, je me sens, à chaque prise, en connivence, en communion. Comme s'il était un peu pour moi un modèle ou un ancêtre.







C'est difficile à expliquer. Bien sûr, il y a la barbe, mais surtout les yeux, le regard.

C'est  comme le sentiment d'appartenir à une même famille, lui, l'aîné, moi le plus jeune ... et d'autres, bien sûr, avant et après.


Savon d'Alep et lait d'ânesse

Ce week-end, c'est braderie au centre ville. On peut acheter des fonds de stock, des horreurs le plus souvent, avec d'incroyables ristournes. Les commerçants sont-ils obligés, lorsqu'ils constituent leur stock, d'acheter un certain nombre d'invendables, qui finiront comme invendus ou offerts lors de la braderie ? Même les plus belles enseignes en effet proposent, à l'occasion de cet événement, des choses immondes.

On y retrouve invariablement aussi des vendeurs de bijoux dits "artisanaux", des marchands de saucissons ou de fromages divers, qui, eux, sont souvent vendus à un prix prohibitif et même des marchands de cuberdons, friandise qui n'est plus ce qu'elle était depuis qu'on en fait même au speculoos !



Et puis je succombe toujours au "vrai" savon de Marseille, au "vrai" savon d'Alep (à base d'huile d'olive et de laurier, une recette multi-millénaire). Le commerçant m'a expliqué qu'il était en rupture de stock à cause des événements en Syrie (mensonge commercial ou vérité ?).



 Et puis, pour la première fois, je trouve des produits "bio" au lait d'ânesse.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Lait_d'ânesse

On savait que Cléopâtre et la femme de Poppée en étaient friandes, je vais peut-être l'être de même.

http://www.lait-d-anesse.com/news__5_comme-cleopatre-ou-poppee_17.html?PHPSESSID=e2f9029be8f81f907ecab34621478b56

Idéal et efficace (?) contre le psoriasis dont je souffre (il s'étend maintenant sur le front), ayant tout essayé, pourquoi ne pas essayer le lait d'ânesse ? Je suis donc revenu fièrement avec mon pack (shampoing, lait corporel, savon).




vendredi 24 mai 2013

Connaissez-vous Timothy Radcliffe ?

Peut-être connaissez-vous mieux Daniel Radcliffe, alias Harry Potter ? Moi je veux vous parler de Timothy Radcliffe.

Sa chevelure un peu rebelle ne correspondait pas spontanément à la dignité de sa fonction. Ses idées, en revanche, sont celles d'un vrai dominicain. Du dominicain, il a l'aptitude à la parole (les dominicains s'appellent aussi "frères prêcheurs") et une grande liberté de ton et de pensée. Rien que pour cela, il mérite l'attention. Timothy Radcliffe a été maître général de l'ordre des dominicains de 1992 à 2002. Il réfléchit encore et toujours sur le monde actuel et les questions qu'il suscite.





De lui, je lis un livre passionnant surtout à cause des nombreuses références que l'on y trouve, toujours invoquées à propos : pères de l'Eglise, littérateurs illustres, sages de l'humanité, musiciens ...

Oui, l'homme de foi doit pouvoir incarner tout cela. Il doit être un homme libre qui visite et revisite les choses du monde, avec un autre regard, toujours nouveau.  Il doit être un homme relié à la diversité et à la complexité du monde. Et ouvert à l'autre et à l'Autre.

On n'acquiert pas cette liberté comme ça. Il faut avoir vécu. Mais, quand toute cette somme d'expérience de vie s'exprime, elle peut porter beaucoup de fruits.

C'est le cas avec Timothy Radcliffe.

Il aurait pu être aussi un bon pape.





lundi 20 mai 2013

Wagner, d'Indy et les amis

Ma peur d'être confronté seul à une foule, même si je sais qu'il s'y trouve des amis, me paralyse.

Mon ami R. me fait franchir le pas, ces derniers temps. Je l'en remercie infiniment. Il m'a convié, hier soir, au concert de clôture du festival Wagner à l'OPRL. Il avait gagné deux places pour ce concert à l'occasion d'un concours et avait décidé de me réserver cette deuxième place en priorité.

A la réflexion, je ne suis pas du tout convaincu des résultats du concours ... J'ai l'impression que R. et deux autres amis, proches de l'OPRL, ont tout mis en oeuvre pour me sortir de ma tanière. Ils ont réussi.

Je ne suis pas déçu.

Le concert comportait deux pièces : l'une de Vincent d'Indy (concerto pour flûte, violoncelle, piano et cordes) ; la seconde,  un arrangement sur le Ring de Wagner par Henk de Vlieger ... soit tout le Ring en 60 minutes. Un bonheur.

En tant que choriste, j'ai chanté des pièces de Vincent d'Indy. Son oeuvre symphonique m'était tout à fait inconnue. Elle est d'ailleurs peu jouée. J'ai donc vécu une belle découverte.

Wagner, ses longueurs, ses outrances ont toujours suscité chez moi un rejet. J'avais donc une appréhension pour la deuxième partie du concert.

Et bien, ce ne fut pas le cas. D'abord le Ring, sans les voix, c'est beaucoup mieux. Ensuite, le Ring, sans les longueurs, c'est bien aussi. L'arrangeur a respecté l'esprit et fait oeuvre originale. Il a rendu en tout cas une chose : le talent de Wagner pour l'orchestration. On peut écouter l'orchestre sans les voix, chez Wagner. On ne le peut pas nécessairement chez Verdi. Voilà ce que j'ai entendu dire par mes amis plus compétents que moi. Je l'ai ressenti. Ils parlaient d'un électro-choc. Je n'irai pas jusque là.

Cette sortie, à laquelle R. m'a conviée, m'a aussi donné l'occasion de serrer bien des mains que je connaissais et de constater que j'étais un "bien aimé" pour beaucoup de gens.

J'espère pouvoir encore vivre de telles choses, une fois au monastère.


dimanche 19 mai 2013

Pentecôte


On connaît l'épisode de la tour de Babel, cet échec, lié à l'orgueil des hommes, qui voulaient atteindre Dieu par leurs propres forces (Gn, 11, 1-9). Ils avaient oublié que Dieu se donne. On connaît aussi l'issue : plus personne ne se comprenait, chacun utilisait une langue différente. Nous en sommes encore là à bien des points de vue. C'est pour cela que ce récit de la Genèse, comme tous les autres, reste d'une étonnante actualité.

Au Sinaï, Moïse a été confronté à Dieu (Ex, 19, 18). De la confrontation de Moïse avec Dieu, on retient trois choses : un buisson ardent (qui flambe sans se consumer), une nuée tempétueuse et une mission audacieuse, celle de prendre la tête d'un peuple perdu pour le mener chez lui, ce n'est pas rien. Mes amis psychiâtres peuvent en témoigner : ce n'est pas simple de mener quelqu'un au lieu du repos. Un feu et une audace, intimement liés.

La présence de Dieu se manifesterait-elle toujours dans le feu et de manière tempétueuse ? Je le pense, par expérience.

Dans le cénacle, 50 jours après la Pâque et la mort de Jésus, les apôtres, des femmes proches, des disciples étaient réunis. Ils avaient peur. Ils se réunissaient en secret, s'encourageant les uns les autres. Or, un événement se produit : un vent violent secoue le bâtiment et des langues de feu apparaissent sur chacun d'eux. Une fois de plus, le tumulte et le feu (Ac, 2, 1-11).

Le résultat est étonnant.

Ils n'ont plus peur. Ils sortent de leur cénacle. Ils parlent une langue que chacun peut comprendre. Babel est maintenant le passé. Ils parlent à tous quelle que soit sa race, quelles que soient ses croyances. Les barrières et les frontières n'existent plus. Paul particulièrement plaidera pour que le message ne soit pas réservé aux circoncis.

Deux choses me frappent particulièrement :
- l'absence de peur, l'abandon de la crainte et l'audace d'être, et de se dire, soi ;
- l'ouverture à tous, sans exclusive, qui implique l'abandon des faux jugements, des a priori, qui divisent.

Cela bien entendu ne peut que nous interpeler dans le concret de nos vies ; il s'agit tout autant d'un sujet de questionnement pour l'Eglise et tous les croyants.

samedi 18 mai 2013

Les hommes politiques


On dit souvent qu'un peuple a les hommes politiques qu'il mérite.

Quand on dit cela, il s'agit moins de dénigrer l'homme politique lui-même que la capacité du peuple électeur à faire le bon choix.

Ainsi, la Wallonie n'aurait eu, selon certains, que les hommes politiques qu'elle méritait : généralement des socialistes pratiquant le clientélisme, embourbés jusqu'au coup dans des affaires .. comme si les casseroles étaient un apanage de la gauche, singulièrement wallonne. Il suffit de jeter un coup d'oeil en France pour s'en convaincre.

Les flamands ont aussi les hommes politiques qu'ils méritent.

La droite, qui sait se montrer arrogante, répugne souvent à présenter le bilan concret et précis de son action. Jetons une fois de plus un regard vers la France. Des chiffres ont enfin été révélés, faisant le bilan du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Le moins que l'on puisse dire est qu'ils sont édifiants. Cela est catastrophique. L'opposition systématique et démagogique que mène actuellement l'UMP ne la grandit par conséquent pas.

http://blogs.mediapart.fr/blog/renelle/010413/les-chiffres-de-la-debacle-sarkozienne-sont-arrives

On ne présente guère, au Royaume de Belgique, de tels bilans. C'est bien dommage. On aimerait disposer en effet du bilan de Didier Reynders pendant qu'il était ministre des Finances. Personne ne le saura jamais, car il n'est pas d'usage, chez nous, qu'un homme politique rende des comptes après son mandat. En l'absence de toute autre sanction que celle de l'électeur, ces politiques par profession sont assurés d'être sans cesse réélus (sauf comportement illicite bien sûr). La sanction politique semble bien illusoire comparée à la sanction pénale.

Il y a heureusement, parmi les politiques, des symboles. Robert Badinter sera à jamais lié, en France, à l'abolition de la peine de mort. Simone Weil sera associée pour toujours à l'interruption volontaire de grossesse. Et Christiane Taubira le sera pour l'ouverture du mariage aux couples homosexuels, projet qu'elle a défendu avec détermination, brio et humanité.

Didier Reynders restera, lui, à jamais associé aux intérêts notionnels et au sauvetage de banques irresponsables. Des mesures qui ont coûté beaucoup d'argent à l'Etat, donc aux contribuables.  On a beau chercher : on  s'interroge toujours sur les retombées précises en termes d'emploi ou de relance économique des intérêts notionnels. Elles sont impossibles à chiffrer, paraît-il. Les intérêts notionnels nous ont valu par contre le privilège d'être considéré comme un paradis fiscal. Monsieur Mittal en sait quelque chose. Nous sommes devenus, sous monsieur Reynders et ses conseillers, un Etat qui permet à des entreprises étrangères d'éviter l'impôt qu'elles devraient payer chez elle (ce qui ne coûte rien à notre budget), mais n'a manifestement ni créé de l'emploi, ni évité aucune perte d'emploi chez nous (au contraire). Nuage et brouillard et aucun bilan déposé. Le concepteur des intérêts notionnels lui-même (Bruno Colmant), reconnaît aujourd'hui les failles et les limites de ce qu'il avait conçu, malgré les avertissements. Monsieur Reynders continue à s'en prévaloir.

Et bien, de la même manière, en quelque sorte, monsieur Jan Peumans, du parti NVA, président du Parlement flamand (ce qui n'est pas rien), sera à tout jamais associé à François Schuiten. Ce dernier est un dessinateur franco-belge de BD reconnu. Le Parlement flamand a débloqué quelques dizaines de milliers d'euros pour une exposition, en son sein, d'auteurs de BD. Il n'a pas plu au président qu'un phylactère soit en français. Il a exigé que le texte soit effacé sur l'affiche, les programmes, les invitations. Comment accepter, au sein du Parlement flamand, une phrase écrite en français ?  Le phylactère en français a donc été remplacé par une bulle vide ! C'est vraiment le degré absolu de la bêtise.

Qu'en pense François Schuiten ? N'y a-t-il pas atteinte à son oeuvre ?

Il ne semble pas avoir réagi, à l'inverse d'un autre auteur exposé, Kamagurka, qui a décidé de retirer son oeuvre, tant il ne peut plus supporter les dérives des nationalistes flamands.

http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/816272/censure-au-parlement-flamand-kamagurka-retire-son-oeuvre.html

Kroll a réagi avec intelligence et humour, comme toujours, à ce lamentable épisode.



Je ne sais pas ce qu'on en ont fait les caricaturistes des journaux flamands. On ne lit guère la presse flamande en Wallonie. On lit plutôt Le MondeLibération ou le Nouvel Observateur. Je me suis permis un petit tour d'horizon (De Standaard, De Morgen, Het nieuwsblad). Première constatation : la caricature ne fait pas partie de la tradition dans la presse flamande, ou alors de manière marginale (De Morgen) ; elle est toutefois alors sans mordant, sans décalage, sans distance, sans aucune auto-dérision. Quant à l'affaire Peumans, elle n'est même pas relatée, sauf dans De Standaard.

Oui, vraiment, en démocratie, le peuple a les politiques qu'il mérite. Le peuple et ses élus ne peuvent que se ressembler. Ce n'est pas réjouissant pour les flamands. Mais que les flamands se rassurent, nous avons eu aussi, en Wallonie, Willy Burgeon !

http://www.sudinfo.be/706134/article/fun/tele/2013-04-18/willy-burgeon-la-coree-du-nord-ne-s-apprete-pas-a-faire-la-guerre-aux-etats-unis

Comme des élections auront lieu en 2014, il n'est pas prématuré de s'interroger sur les raisons qui inciteront l'électeur à élever au pouvoir tel ou tel : idéologie, assistanat et clientélisme, haine de l'autre, tradition, sympathie, belle gueule, capacité à couper la parole dans un débat, réalisations ... et peut-être éventuellement un projet politique, qui ne ressemble souvent quant à lui qu'à un catalogue de promesses qui ne seront pas tenues. Pour le reste, aucun bilan n'est jamais présenté à l'électeur, sauf lors de confrontations de campagne où chacun lance des chiffres à la tête de l'autre, tandis que l'auditeur, futur électeur, est incapable de les vérifier, ni de les recouper.

N'y a-t-il pas là un champ de réflexion : la reddition des comptes par les politiques, par rapport à leurs promesses, mais surtout au regard de l'intérêt général : une fois au pouvoir, quel a été leur apport à l'intérêt général, à la société toute entière ?

vendredi 17 mai 2013

Amour excluant ou incluant ?

Je n'avais jamais imaginé qu'il puisse exister un amour excluant, tant les termes me paraissent antinomiques.

J'ai découvert, en lisant Marianne, que sur les sites et les courriers des lecteurs du monde catholique, un malaise, plus que cela un mal à l'âme, de plus en plus grand, s'exprime.

http://www.marianne.net/Mariage-gay-le-mal-a-l-ame-des-Cathos-blesses-par-l-Eglise_a228707.html

Il s'exprime notamment à propos du désir de reconnaissance des couples homosexuels et de leur désir de pouvoir élever un ou des enfants. On devrait se réjouir de voir des couples amoureux et stables avoir des désirs aussi normaux : se marier, avoir des enfants et leur offrir le meilleur pour le futur.

Il n'y a pas plus de dépravés chez les homosexuels que chez les hétérosexuels, faut-il le dire.
Les couples "bon chic-bon genre", catholiques pour la forme ou par tradition, avec leur nombreuse progéniture, sont loin d'être exempts de turpitudes. Ils feraient donc bien de garder profil bas, plutôt que de se présenter comme des modèles de vertu  pour les autres.

Mais l'article parle surtout des catholiques blessés par l'Eglise.

Oui, il y a de plus en plus de catholiques blessés par l'Eglise et qui se disent malgré tout croyants.
Ils continuent, vaille que vaille, à la recherche de communautés ouvertes et accueillantes.

Il s'agit de chrétiens croyants et engagés qui n'en peuvent plus du décalage entre le discours et les attitudes de ceux qui constituent la hiérarchie de l'Eglise et leur vie à eux, la vie.

Il s'agit de chrétiens croyants et engagés qui se sentent stigmatisés, rejetés, exclus pour des raisons qui n'ont évidemment rien à voir avec l'amour du prochain.

L'amour demandé par Jésus serait-il donc excluant ? La communauté des croyants serait-elle un cénacle fermé ? Rappelez-vous la Pentecôte ... Ce jour, où les apôtres ont reçu l'Esprit saint. Ils sont sortis du cénacle, où ils se réunissaient pour se réconforter, entre eux, car ils avaient peur. Et que se passe-t-il ? Ils sortent du lieu clos. Ils osent, au delà de leur peur, affronter le monde dans toute sa diversité.  Je dis bien toute sa diversité, qui bien sûr n'est pas que de langues et de races. L'Eglise d'alors ne pratiquait pas l'exclusion, mais l'ouverture. Paul n'a-t-il pas dû se battre pour donner une place, dans la communauté, aux non-circoncis ?

Faudra-t-il éternellement se battre comme Paul, pour que l'Eglise tienne un discours incluant et non excluant ?

En s'affichant à la tête des manifestants anti-mariage gay, monseigneur André Vingt-Trois a finalement démontré à tout le monde qu'il ne valait pas mieux que Frigide Barjot. Quelle est
encore la crédibilité de ce prélat ?

On attend beaucoup du pape François. Puisse-t-il ne pas nous décevoir !

P.S. J'écris ceci à quelques jours de la Pentecôte et au jour dédié à la lutte contre l'homophobie.







mercredi 8 mai 2013

Coexistence, communion, irrationnel et Islam


Quelques événements récents ont retenu mon attention :
- dans une ville du nord de l'Angleterre, la communauté musulmane a mis de sa poche pour sauver de la démolition la synagogue que la petite communauté juive (30 personnes) ne parvenait plus à entretenir
http://www.lalibre.be/societe/general/article/813702/une-synagogue-sauvee-par-la-communaute-musulmane.html
- le papa d'Ihsane, ce jeune marocain liégeois homosexuel qui a subi les sévices et les tortures de quelques décérébrés, avant d'en mourir, est venu partager sa douleur de père, mais aussi son pardon, devant quelques homosexuels chrétiens, lors d'une réunion locale de la Communauté du Christ Libérateur. D'après ce qu'il m'a été dit, cette rencontre fut dense en émotion. Il a promis, comme professeur de religion islamique, de revenir, dans un mois, après avoir approfondi la question de l'Islam et de l'homosexualité (http://www.rtbf.be/info/regions/detail_le-papa-d-ihsane-jarfi-ce-jeune-victime-d-un-crime-homophobe-sort-un-livre?id=7981896) ;
- un reportage dans un village de Haute Egypte révèle que, depuis toujours, chrétiens coptes et musulmans, cohabitent sans aucun problème, les enfants jouent ensemble et vont ensemble à l'école, les paysans collaborent, les mères parlent de leurs enfants au marché. Mais des adeptes des frères musulmans, au pouvoir, sont venus détruire des maisons et, au Caire, de violents affrontements opposent régulièrement musulmans et coptes (http://www.lalibre.be/actu/international/article/813751/les-familles-coptes-veillent-desormais-sur-leurs-martyrs.html);
- il existe, en Iran, deux communautés particulièrement minoritaires : les juifs et les arméniens (il doit bien y avoir quelques sunnites et chrétiens aussi). Quel est leur statut ? Un juif dit que la communauté est protégée. On a peine à le croire. On lit pourtant ceci : http://french.irib.ir/info/iran-actualite/item/238634-c-est-quoi-d-être-juif-en-iran

Alors que spontanément les gens se fréquentent, coopèrent, s'apprécient, d'autres n'ont de cesse de  diviser, opposer et stigmatiser. Ils le font pour des raisons religieuses ou politiques,
et plus souvent encore par bêtise, par manque d'éducation et de culture. Parfois les trois se conjuguent. Ils sont partout, même chez nous, et surtout sur les forums des journaux.

Bien du chemin reste encore à parcourir.

Au risque de déplaire, je dois bien constater cependant que des trois religions monothéistes, la seule à inspirer encore la violence, la lutte armée, le terrorisme est l'islam. A partir du moment où l'on qualifie arbitrairement les autres d'infidèles, il y a un ver dans le fruit, ce qu'heureusement de nombreux musulmans modérés concèdent. Les autres, moins instruits ou manipulés, s'engouffrent dans ce qu'il faut bien appeler un vain combat, dont le seul bilan est le nombre de morts.

L'Islam est confronté à un grand défi : sortir de l'obscurantisme. Le premier défi posé aux musulmans est l'éducation, afin que ce qu'il y a lieu de croire ne dépende plus d'imams sans culture et sans contrôle. Il ne s'agit pas seulement de la formation des imams, mais bien du peuple des croyants. C'est ce qui se produit pour les nombreux musulmans vivant en occident qui accèdent à l'éducation. Le deuxième défi que l'Islam devra affronter est le rapport au texte sacré qui doit pouvoir être lu non comme un texte figé, mais comme un texte toujours à revisiter, afin qu'il soit vivant et source de progrès. Si Allah a pris soin de confier aux hommes le Coran, c'était pour les faire avancer et non pour qu'ils stagnent. Enfin, me semble-t-il, le troisième défi de l'Islam est de séparer le religieux du temporel, des traditions, des coutumes, de tout ce qui est culturel et en rien religieux. Ce qui est inquiétant, c'est de voir la religion invoquée pour justifier des pratiques et des usages qui n'ont finalement pas de réel fondement religieux.

Enfin, une chose me frappe quand je parle avec des amis musulmans (j'en ai beaucoup et même de très proches) : ou ils quittent de plus en plus la religion (sans apostasier ... car ils seraient passibles de la peine de mort, que n'importe quel musulman pourrait exécuter), ou ils s'enferment dans une sorte de schizophrénie, où ils ne parviennent plus vraiment à déterminer qui ils sont, à cause de leurs efforts d'ouverture.








samedi 4 mai 2013

Un enfant et deux papas (ou deux mamans)

Un ami gay vient d'être papa, ce jour. Avec son compagnon de longtemps, ils ont vécu et accueilli, ce jour, la naissance d'un petit garçon offert par une mère porteuse, aux Etats-Unis, avec toute l'émotion que l'on peut imaginer.

Retenez ces quelques mots : l'émotion, l'enfant offert, l'enfant accueilli.

Et puis, leur couple qui s'ouvre sur un autre qu'eux, infirmant l'affirmation selon laquelle les couples homos seraient narcissiques, refusant l'altérité dans la recherche perpétuelle d'eux-mêmes dans une espèce de miroir.

Comme les couples hétéros stériles (ou d'autres qui ne le sont pas, d'ailleurs), ils ont fait appel à une procédure alternative de parenté, ni plus, ni moins. L'accueil d'un enfant serait-il plus suspect quand le couple est homo que quand le couple est hétéro ?

Ce que l'on permet aux uns (l'adoption, la GPA), y a-t-il lieu de le refuser aux autres ?

Moi, je ne retiens qu'une chose : l'amour que je constate. Je parle bien d'amour. Il s'agit bien d'amour quand un couple s'ouvre pour accueillir un autre qui va tout bouleverser, qui va demander du temps, de l'attention, des nuits sans sommeil, etc.

Aux opposants, qui, en France, ont brandi le Code civil, considéré comme immuable, je ferai remarquer que ce Code civil ne parle jamais d'amour. Il parle d'intérêts et de devoirs.








mercredi 1 mai 2013

La dame de compagnie

Ce premier mai, je ne pouvais pas ne pas apporter quelques brins de muguet à ma mère et déjeuner tout simplement avec elle, en terrasse, d'un plat unique (version entrée) d'asperges à la flamande. Elle était ravie, moi aussi. Les petits-enfants avaient d'autres priorités. Et dire que ma mère imaginait recevoir "toute la famille" chez elle, me demandant d'aller acheter une bouteille de vin blanc et des choses à grignoter. J'ai dû secouer Sam pour qu'il se manifeste ; quant à Ben, il n'est pas du genre à oublier ... mais ?

J'ai évoqué, avec ma mère, mon départ prochain au monastère, tout en lui faisant comprendre qu'il y aurait encore des moments comme cela entre nous. Elle n'en revient toujours pas : tu vas devenir moine ? Oui, je vais surtout être moi ; je vais essayer et je ne serai pas tout seul. Et je ne serai jamais très loin de toi.

Captant notre conversation - ma mère parle fort, parce qu'elle n'entend plus très bien - une dame nous explique qu'elle est infirmière à mi-temps et dame de compagnie pour l'autre mi-temps à la résidence Prestige à Embourg. Elle accompagne un pauvre hère, fortuné, qui n'est plus accepté au restaurant de la résidence, parce qu'il mange trop salement. Elle l'accompagne depuis quinze ans. Avant, ils sortaient de temps en temps, maintenant plus.

Pendant que ma mère était partie aux toilettes, cette dame m'a dit qu'elle n'en revenait pas de l'âge de ma mère (91 ans), sur le fait qu'elle marche encore aussi bien pour une personne de son âge (et pourtant, si elle savait), de ses conversations. Son verdict a été clair : votre maman n'a pas sa place dans une maison de repos, même de luxe. Je le crois aussi.

Ma mère doit encore rester dans le tourbillon de la vie, avec des limites, des aides et surtout des rencontres. Un nouveau paysage se dessine en tout cas. Elle commence à apprivoiser les moments de solitude. Encore un pas, et elle va se remettre à l'aquarelle !