Pourquoi fêter Noël ?
Nul tout d’abord n’est tenu de fêter Noël, et il y a bien
des manières de fêter, ou de ne pas fêter, Noël.
Certains ne fêteront pas Noël, et c’est leur droit. Que ce
soit sans rancœur, sans acrimonie, sans condescendance ou persifflage à l’égard des autres.
Certains aimeraient pouvoir fêter Noël et ne le pourront pas
pour des tas de raisons : solitude, pauvreté, intolérance ou insécurité
religieuses … Je pense particulièrement à eux.
Certains fêteront Noël sans savoir ce qu’ils fêtent, juste
pour la fête. Puisse l’esprit de convivialité l’emporter chez eux sur la course
effrénée aux mets raffinés et aux cadeaux.
Certains aideront les autres à passer Noël en leur donnant
un peu de chaleur humaine ou parce que c’est leur travail. A eux aussi, je
pense.
Certains quand même savent que Noël est un anniversaire,
celui de la naissance d’un certain Jésus, même si leur connaissance du dit
Jésus est bien imparfaite. Comme disait une jeune américaine à un père abbé
irlandais : » C’est tout de même merveilleux que Jésus soit justement
né le jour de Noël ! ».
Certains se réjouiront parce qu’ils aiment en Jésus son
message d’amour, ses paroles libératrices, son amour des pauvres et des exclus
… Ceux-là aiment peut-être même Jésus sans croire en Dieu, ni en la
résurrection.
Certains, moins nombreux sans doute, feront la fête parce
qu’ils voient en Jésus plus qu’un homme admirable, peut-être même un homme
devenu Dieu, soit parce que Dieu l’a divinisé, soit parce que les hommes l’ont
divinisé. On a le droit de croire cela, on ne risque rien : il y a
longtemps qu’on ne brûle plus les hérétiques.
D’autres encore professeront quelque chose d’inouï et
d’unique : l’incarnation de Dieu, Dieu qui s’est fait homme en Jésus.
C’est ce que nous fêterons au monastère ce mardi soir. Personne n’est obligé de
croire cela, mais c’est la foi des chrétiens. Ce Dieu-là me plaît. Pour ma
part, je ne puis pas croire à un Dieu qui assisterait de son balcon à notre
aventure humaine, avec son poids de souffrance et de détresse, sans venir s’y
tremper de tout son être. Je ne pourrais pas croire à un Dieu qui verrait nos
croix sans être lui-même crucifié. Le Dieu du judaïsme et de l’islam est
peut-être très proche des hommes, plus
proche de l’homme que la veine de son propre cou, dit le Coran, mais, sans
l’incarnation, il reste indemne.
Dieu fait homme. Comment est-ce possible, allez-vous me
demander ? Comment pourrais-je répondre ? Il faut être Dieu pour
savoir comment on devient homme quand on est Dieu. Que l’Esprit saint et la
vierge Marie aient été appelés à la rescousse, comme les évangiles le
racontent, est finalement une possibilité et une question de foi.
Oui, en devenant homme, Dieu a voulu abolir toute distance afin
d’associer l’humanité, en chaque homme, à sa vie divine. Voilà ce que je
célébrerai à Noël. Cela vaut bien une fête.
Heureux Noël à tous.
PS. J’emprunte plusieurs idées et formules de ce texte à
notre frère François. Qu’il en soit remercié.
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