A Liège, mais pas seulement, cette fin de semaine a été l'occasion de faire la fête à la musique.
Traditionnellement, depuis sa création par Jack Lang, cette fête coïncide avec le solstice d'été.
Le 21 juin.
Le jour le plus long ... brrr!
Jours de frimas, en effet, cette année, où on nous parle sans arrêt de réchauffement de la planète.
Pour moi, le plus important dans cette initiative est la gratuité.
Des musiciens offrent leur musique gratuitement à qui est prêt à la recevoir.
Et les auditeurs sont nombreux.
Une autre chose importante est (ou devrait être) qu'on puisse fêter la musique partout.
A la salle philharmonique, plusieurs concerts gratuits étaient proposés autour d'une personnalité hors du commun: Wayne Marshall. Un musicien "trans-genre". Ses prestations ont été, paraît-il, époustouflantes. A n'en pas douter, les dirigeants de l'O.P.L. ont créé l'événement.
Je n'y ai pas assisté, mais j'ai écouté Wayne Marshall. Je vais expliquer pourquoi je n'y ai pas assisté.
A vrai dire, j'ai déjà, dans le fond, exposé les deux raisons qui fondent ma position:
- si le public pouvait assister gratuitement aux prestations de Wayne Marshall, je doute que lui soit venu gratuitement;
- les fêtes de la musique sont, pour moi, une occasion unique d'inverser les mécanismes classiques: pendant ces jours, il ne s'agit pas de convier le public dans les lieux traditionnellement dédiés à la musique, mais d'inviter la musique là où on ne l'entend pas d'habitude.
N'allez pas croire que je sois un esprit chagrin, je vais vous décrire comment la "fête de la musique" s'est déclinée, pour moi, au pluriel: "fêtes" et "musiques".
Vendredi soir.
Ils devaient avoir dix huit ans ... mais, nom d'une pipe, si j'ose dire, ils offraient un jazz des plus convaincants sur le podium de la place des Carmes.
Samedi soir.
A l'initiative de l'Aquilone, boulevard Saucy, trois concerts en plein air.
http://www.aquilone.be/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=2&Itemid=35
Le premier, le plus inattendu: " Les Anchoises", soit deux filles, l'une à la clarinette, l'autre au saxophone baryton ... pour des arrangements inédits, rythmés, revisitant des chansons des années 60-70. Ambiance garantie: les gens chantant en choeur "Les champs Elysées" ou "Killie watch". Leur programme: "Les Anchoises se crèpent le chignon, à cause des garçons, et aussi pour savoir qui est poupée de cire et qui poupée de son. ...".
Le second "Seydou Sanou & Yiri-Massa", la musique du Burkina-Faso descendue boulevard Saucy. Djembé, xylophone traditionnel et chant. Et "Bougez ..." les burkinabe, les ghanéens, les ivoiriens, les marocains, les algériens, les liégeois, les femmes, les hommes ... "bougez". Impossible de rester sans bouger, il est vrai, j'en témoigne. En témoigne aussi une dame très âgée du boulevard qui, écoutant la musique de chez elle, m'a dit, le lendemain, avoir écarté les meubles ... pour bouger elle aussi!
Enfin, un moment inoubliable: Sukarma. Trois musiciens népalais. Leur musique était beauté. Ils étaient beaux. Etaient-ils beaux parce que leur musique était belle ou leur musique était-elle belle parce qu'ils étaient beaux? Ils ont été généreux et, contraint de rentrer chez moi à cause de mon dos douloureux, je les ai encore entendus, de ma chambre la fenêtre ouverte. Moment absolu de pureté. Plus pur encore entendu de loin dans la nuit naissante.
Dimanche matin
Place aux fanfares. J'adore les fanfares! Je préfère les suivre ... car, si je reste sur place, au fur et à mesure qu'on va vers les tubas, les bombardons et les hélicons, plus les larmes me submergent!
Ici encore, la diversité est aujourd'hui réjouissante.
Le monde des fanfares a bien changé.
La fanfare liégeoise des "Cadets de la marine" incarne toujours la fanfare en uniforme, rigoureuse, qui joue principalement des marches militaires et leur prestation musicale est toujours irréprochable.
http://www.musiquedescadets.be/
Suit la catégorie des fanfares villageoises, gardienne d'une tradition qui incroyablement se maintient.
Le "Royal guidon hesbignon" reste, à ce jour, la seule fanfare cycliste au monde!
http://www.royalguidonhesbignon.be/
Le monde des fanfares villageoises est aussi un extraordinaire écho des querelles villageoises d'antan. Ainsi, en est-il des deux fanfares de Jauche, qui étaient respectivement: "La Fanfare royale - Les fanfares" et "La Fanfare royale - Les Amateurs", devenues après fusion "Les Fanfares de Jauche", nom qui a moins de panache, convenons-en.
http://www.lesfanfaresdejauche.be/index2.html
Enfin, viennent les nouvelles venues: les "fanfares foutraques" (je laisse de côté les "bandas" de la Basse-Meuse, qui sont au monde des fanfares ce qu'est Patrick Sébastien au regard de l'académie française).
Ces "fanfares foutraques" ont des costumes "foutraques", des noms "foutraques", ne jouent pas toujours absolument juste, mais elles se marrent et leur bonne humeur est communicative. Elles sont aussi parfois un peu engagées. J'ai ainsi entendu:
- "Pas ce soir, chéri", une fanfare de femmes en rose ...
- "Pouet-en-stock - Fanfare sauvage" ... tout un programme!
- "Sans tambour, ni trompette", la seule fanfare, à ma connaissance, comportant deux violoncellistes!
- "On prend l'air": un fabuleux bastringue, c'est eux qui le disent!
http://video.rtlinfo.be/video/177658.aspx
http://www.pouetenstock.be/
http://www.stnt.be/
http://www.esperanzah.be/index.php/fr/programme/les-scenes/on-prend-lair
Dimanche après-midi
La fenêtre était ouverte, je repassais. Il faut bien repasser de temps en temps, quand solitaire on est. J'entends des voix, des harmonies. Je laisse là mon linge. A quoi bon le linge, quand la musique appelle.
Une chorale: "Les Bengalis". Ayant fait partie, dans ma jeunesse et mon jeune âge adulte, d'une autre chorale qui s'appelait "Les Colibris", j'avais nourri une once de mépris pour ces concurrents. Sous la bannière des Colibris, nous avions un avantage: le colibri est le seul oiseau qui ne chante pas! Le seul son qu'il émet est celui de ses ailes. Et vous ne m'avez jamais entendu voler ...
J'ai été "bluffé" (comment dit-on en français: "épaté", "esbaubi", "espatrouillé"?). En plein air, a cappella, cela se tenait! Excellent équilibre des pupitres. Répertoire éclectique: du classique, de la comédie musicale américaine, de la chanson française (heureusement pas de gospel). Et surtout des chanteurs heureux de chanter. J'ai connu plusieurs chefs de chorale: ils sont rares (très rares même) ceux qui mettent le sourire aux lèvres de leur chanteur. C'était le cas, cet après-midi. Ne vous étonnez pas, si le public aussi avait le sourire aux lèvres.
J'ai ainsi fêté la musique à ma mesure. Sur le terrain. Plusieurs genres de musiques. Et surtout des musiciens qui avaient le bonheur de partager, amateurs d'abord et surtout, semi-professionnels ou professionnels accomplis.
Dimanche soir
Je serai présent à 20 heures pour un concert "Jasstango": une rencontre entre chants populaires et musique de chambre.
J'en parlerai demain.
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