L'intitulé de cette contribution peut paraître sans queue, ni tête. Il n'en est rien.
Commençons par mon barbier. Je porte la barbe depuis l'âge de 18 ans (sauf deux très courtes périodes, où je longeais les murs). Elle était plus fournie et surtout plus colorée alors que maintenant. Longtemps, j'ai pris soin de ma barbe moi-même. J'ai encouru bien des reproches pour les poils que je laissais alors dans le lavabo de la salle de bains. Depuis une dizaine d'années, je m'en remets à mon barbier, qui est aussi mon coiffeur de temps en temps.
Je dois avouer ici une jouissance. Autant l'usage du rasoir électrique ou de la tondeuse à domicile est sans joie, autant il est agréable de recevoir la mousse sur la peau, étendue avec un blaireau, puis de sentir passer le rasoir là où il faut, mon barbier passant trois fois, puis il me tapote et finit par un peu de talc et du "sent bon". Tout cela, pour 4 euros! C'est un plaisir peu onéreux que j'aime m'octroyer. Mon barbier est algérien et à la radio j'entends souvent psalmodier le Coran.
Les barbiers américains eux ont, dans des associations professionnelles de loisirs, semblables à celles qui ont suscité en nos contrées des chorales ou des fanfares chez les travailleurs de la mine, répandu une tradition de quatuors vocaux a cappella composé de voix égales masculines. J'ai, dans mes archives, quelques partitions de cette tradition. Je cherche trois autres chanteurs pour les chanter un jour.
Ils adoptaient un style d'harmonie fait de quatre parties d'accords consonants pour chaque note mélodique dans une texture principalement homophonique. La voix basse était la seule à jouir d'une relative liberté.
Cette ancienne tradition a connu une époque de renouveau dans les années 1930-40 avec l'apparition d'ensembles noirs s'inscrivant dans la tradition du negro-spiritual, qui y ont ajouté le swing. Le plus célèbre d'entre eux est The Golden Gate Quartet, mais on peut citer aussi The Ink Spots et The Mills Brothers, moins inspirés l'un et l'autre que les premiers par la tradition religieuse. Le répertoire devient plus sentimental, et surtout plus soumis aux exigences de la variété.
Des instruments se sont joints: une guitare, un piano, ou un trio (piano, basse, batterie). Peu à peu aussi, la tradition flirtera avec le jazz naissant. Un standard comme Alexander's ragtime band sera ainsi décliné de multiples façons. The Andrews Sisters, en plein conflit mondial, se feront un nom. Elles ont créé des émules, et pas seulement dans les boîtes gay ou de transformistes. Aujourd'hui, les Puppini Sisters n'ont rien à envier à celles qui les ont précédées.
Dans la foulée, est né un peu plus tard le style "wop-doo-wop" qui a connu son heure de gloire dans les années 1950 et a suscité bien des vocations. Les ensembles alors deviennent mixtes parfois et de moins en moins a cappella. Un soliste et trois choristes qui font "wop-doo-wop". On peut citer ici, parmi de très nombreux représentants du genre The Platters, mais aussi The Temptations.
La tradition des barbershop quartets est néanmoins restée très vivante aux Etats-Unis et au Canada, jusqu'à aujourd'hui. Elle donne lieu à des festivals et à des compétitions où le costume, la gestuelle et l'humour priment parfois sur la musique. Leur aspect kitsch est totalement incompréhensible pour qui n'est pas un américain du nord.
Il existe ainsi encore actuellement des quatuors vocaux blancs chantant du gospel et du country, galvanisant les foules, avec des chants religieux, en vrais professionnels du show-bizz, lors de rassemblements souvent bon enfant, mais qui moi m'inquiètent quand même un peu. Parallèllement, des ensembles beaucoup plus marqués par le jazz, comme The Manhattan Transfer, ne renient pas du tout leurs origines.
Le style qu'on appelle close harmony est l'héritier de cette tradition. Il se caractérise par une écriture très riche, inventive, sophistiquée même sur le plan harmonique, comportant néanmoins une contrainte, l'étendue du spectre des voix: il peut s'agir d'un trio féminin, d'un quatuor masculin, d'un quatuor mixte, d'un sextet masculin (du contreténor à la basse) et, dans la forme la plus ouverte, de 8 chanteurs mixtes de la soprano à la basse. La voix est cependant toujours privilégiée. La voix, les voix, d'où mon intérêt pour cette tradition. On peut citer ici des ensembles very british (comme les King's singers ou Voces8 ...). Mais je pense aussi au Quarteto Em CY, dans la musique brésilienne.
Sélection d'illustrations sonores anonymes et dans le désordre (c'est plus drôle ... vous allez être obligés de les écouter toutes!)
http://www.youtube.com/watch?v=qPTbgvzgMZU
http://www.youtube.com/watch?v=mQwb4SpNuKo&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=da21psYw39k&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=n-XQ26KePUQ&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=yjvRDTIiMTg&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=hZuB-Y3L0Ys&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=f-EfmZXTUq4&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=xZ6-2XwvUCE&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=y9JCEv7p4EE&feature=related
http://www.singers.com/choral/voces8.html
http://www.dailymotion.com/video/x6k6rl_swing-low-sweet-chariot-the-jordana_music
http://www.youtube.com/watch?v=0f4e0pssQWs&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=YFk5hrpw9Rs&feature=related
http://www.tv5.org/cms/chaine-francophone/Revoir-nos-emissions/Acoustic/Episodes/p-14104-The-Golden-Gate-Quartet.htm
http://www.youtube.com/watch?v=q4W8Uw00hs8&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=bBbgZauYL1Q
http://www.youtube.com/watch?v=8myK93FqbYc&NR=1
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