Quel rapport me direz-vous avec la musique religieuse? Cette réflexion sur Facebook d'un collègue, plus âgé que moi, qui a acquis le statut de maître à penser, à son corps défendant peut-être, mais cela est un fait.
"Il est amusant de voir comme les mécréants que nous sommes sont sensibles à la (bonne) musique religieuse. N'est-ce pas que celle-ci nous parle moins de la réponse consolatrice (délirante) que de l'état douloureux (inéluctable) qui a suscité la question?".
Il est d'abord réjouissant de constater que les mécréants sont sensibles à la musique religieuse; ils font ainsi preuve d'une grande ouverture d'esprit. Il est tout aussi réjouissant de constater que les mécréants sont capables de s'amuser d'eux-mêmes. Il n'en reste pas moins que le jour où l'on commence à s'amuser de soi-même est souvent le signe bénéfique qu'on est prêt à reconnaître certaines failles dans ce que l'on a construit en soi, sur soi et autour de soi. Les mécréants formulent néanmoins une condition: il établissent une distinction entre la bonne et la mauvaise musique religieuse. N'est-ce pas là l'expression d'un jugement de valeur? Soit, précisément, ce que ce maître voulait éviter à ses étudiants, puis à ses disciples.
Apparemment, les mécréants partagent avec les croyants un "état douloureux inéluctable"; je veux dire par là qu'ils n'y échappent pas plus que les autres.
Ils parlent aussi d'une question que cet état suscite, mais il y a bien des manières de poser une question. Souvent, la réponse dépend de la manière dont on pose la question. Quelle est la question?
Ils évoquent "une réponse consolatrice délirante", la réponse religieuse, délirante puisqu'ils sont mécréants.
N'est-ce pourtant pas précisément la foi en cette réponse qu'ils qualifient de délirante qui a inspiré des générations d'artistes?
Il y a évidemment une nuance entre ce qui a inspiré l'artiste et ce qui interpelle le spectateur ou auditeur.
Le mécréant résume sa perception, qui n'est pas moins sensible que celle d'un autre, à l'état douloureux inéluctable à tout homme que véhiculerait le message artistique.
C'est faire peu de cas du créateur de l'oeuvre et de ce qui l'a inspiré. Le spectateur, l'auditeur, ont-ils à calquer sur l'oeuvre leur vision des choses pour s'approprier l'oeuvre, au risque de la trahir? L'ouverture d'esprit n'est peut-être pas dès lors aussi grande qu'on pouvait le croire.
Le mécréant serait d'ailleurs, s'il fallait éradiquer tous les créateurs qui ont été inspirés par des réponses consolatrices délirantes, fort peu pourvu en émotions artistiques et musicales.
Peut-on écouter Bach, par exemple, en dissociant la question et la réponse? Ecouter Bach, sans entendre la réponse, est entendre une petite partie seulement de Bach.
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