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mardi 29 septembre 2009

29 septembre 2009 - bis

Pablo NERUDA ...

Je prends congé, je rentre
Chez moi, dans mes rêves,
Je retourne en Patagonie,
Où le vent frappe les érables,
Où l'océan disperse la glace.
Je ne suis qu'un poète.
Et je vous aime tous,
Je vais errant par le monde que j'aime.

Dans ma patrie,
On emprisonne les mineurs
Et le soldat commande au juge.
Mais j'aime, moi, jusqu'aux racines
De mon petit pays si froid.
Si je devais mourir cent fois,
C'est là que je voudrais mourir.
Et si je devais naître cent fois,
C'est là aussi que je veux naître.
Près de l'araucaria sauvage,
Des bourrasques du vent du sud,
Et des cloches depuis peu acquises.

******

La Poésie

Et ce fut à cet âge...
La poésie vint me chercher.
Je ne sais pas, je ne sais d'où
Elle surgit, de l'hiver ou du fleuve.

Je ne sais ni comment ni quand,
Non, ce n'étaient pas des voix,
Ce n'étaient pas des mots,
Ni le silence:
D'une rue elle me hélait,
Des branches de la nuit,
Soudain parmi les autres,
Parmi des feux violents
Ou dans le retour solitaire,
Sans visage elle était là
Et me touchait.

Je ne savais que dire,
Ma bouche ne savait pas nommer,
Mes yeux étaient aveugles,
Et quelque chose cognait dans mon âme,
Fièvre ou ailes perdues,
Je me formai seul peu à peu,
Déchiffrant cette brûlure,
Et j'écrivis la première ligne confuse,
Confuse, sans corps, pure
Anerie, pur savoir,
De celui-là qui ne sait rien,
Et je vis tout à coup le ciel
Égrené et ouvert,
Des planètes, des plantations vibrantes,
L'ombre perforée, criblée
De flèches, de feu et de fleurs,
La nuit qui roule et qui écrase, l'univers.

Et moi, infime créature,
Grisé par le grand vide
Constellé, à l'instar, à l'image du mystère,
Je me sentis pure partie de l'abîme,
Je roulai avec les étoiles,
Mon coeur se dénoua dans le vent.

(Mémorial de l'île Noire, 1964)

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