Quand j'étais professeur d'université, je n'attachais guère d'importance au statut social qui y était attaché, à la reconnaissance par mes pairs et encore moins aux insignes de la fonction (toges et décorations). J'ai toujours envisagé ma mission comme une relation entre moi et mes étudiants, vision réductrice, diront certains et sans doute solitaire, voire fondée sur une trop grande estime de soi. J'avais l'envie de leur transmettre quelque chose : selon la formule consacrée, un savoir, un savoir-faire et un savoir être. Je ne leur ai pas appris le savoir paraître, ni la meilleure manière pour faire carrière. Peut-être aurais-je dû ? De toute façon, je n'aurais pas pu.
La plus grande joie que puisse éprouver un professeur, c'est lorsque il obtient, quelques années après, un retour de ses anciens étudiants. Comme je n'ai jamais investi dans le paraître, ni la carrière, ce retour est d'autant plus riche ; il concerne toujours le savoir transmis (et la manière de l'avoir transmis) et, plus souvent encore, le savoir être.
Les étudiants qui me tutoient aujourd'hui ne sont pas particulièrement devenus des collègues ou des collaborateurs ou des associés. Ceux qui me remercient surtout pour le savoir me disent encore régulièrement "monsieur parent", voire "monsieur le professeur", pas tous cependant.
Je pense surtout aux autres pour qui le savoir être, ou une certaine manière d'être, a créé une connivence sans égard à la différence d'âge. Souvent le goût pour la musique, le théâtre, la littérature, voire un certain détachement vis-à-vis des conventions, et partant un certain humour, nous a rapprochés. Faire de la musique ensemble ou jouer une même pièce de théâtre supprime en effet beaucoup de distance.
J'aime beaucoup les revoir, prendre un café avec eux ou partager un déjeuner. J'aime parler de leur vision de la vie et de leurs idéaux dans la pratique de leur profession, de leurs engagements politiques aussi parfois. Ils me parlent même parfois de leur vie sentimentale. Quand ils m'en parlent, je suis le plus heureux des hommes. Pour la confiance qu'ils me témoignent, pour l'affection partagée, pour le vent de jeunesse qu'ils font souffler dans ma vie.
Finalement, j'ai passé une grande partie de ma vie à beaucoup parler devant des auditoires (et aussi à écrire). Et je réalise que ce que je préfère, c'est d'écouter et dialoguer. Mon attachement indéfectible à l'examen oral n'en témoigne-t-il pas ?
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Il y a 11 mois
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