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dimanche 9 septembre 2012

Infidèles (Abdellah Taia)

Cela fait des années que je connais Abdellah Taïa, comme auteur, et que je guette tout ce qu'il écrit. J'en ai déjà parlé précédemment.





Il parle toujours du Maroc, un pays qui, pour moi, évoque bien des choses, des images et des senteurs bien sûr,  avec mes fils au printemps, des liens tissés ici et là-bas, des expériences qui m'habiteront à jamais, un ami qui a partagé quelques années de ma vie au quotidien. Une amitié profonde, teintée d'amour et de tant de tendresse. Une relation qui ne pouvait être que sans lendemain. Après trois ans ensemble, il est retourné  là-bas et je suis resté ici.  Pourtant c'est lui, le musulman, qui m'a remis sur le chemin de la prière et m'a rendu la foi.

C'est sans doute à cause de cela que les romans d'Abdellah Taia m'ont toujours profondément ému, Il parle de ce qu'il sait, sans fard, sans cette hypocrisie qui caractérise tellement les sociétés musulmanes ; il parle du Maroc de son enfance et de son adolescence, du temps du roi Hassan II.

Son dernier roman, Infidèles, raconte l'histoire de Slima et de son fils Jamal. Elle prostituée, appelée à jouer le pire des rôles dans la société marocaine, celle que tout le monde méprise et dont personne pourtant ne peut se passer : les soldats, l'imam, les puissants, les hommes seuls et les hommes mariés, et aussi les familles : c'est elle qui, lors des nuits de noces, est dans le lit avec les jeunes époux pour leur expliquer comment il faut faire, dans cette société où les hommes, après l'enfance, n'ont jamais connu que d'autres hommes et dont les femmes sont terrorisées à l'idée de montrer leur corps. Or, il faudra pourtant montrer le drap taché de sang preuve de la virginité de la belle aux yeux des familles. On la payera pour cela, puis on la méprisera. Une telle femme ne peut pas être une bonne musulmane. Tous ont besoin d'elles, mais aucun ne lui reconnaît le droit d'exister pour elle-même.

Jamal n'est pas le fils de Slima. Jamal est un enfant sans père. Entre elle et lui, les deux blessés de la vie, les deux parias, c'est d'amour qu'il s'agit. Un amour fusionnel. Ils vont s'inventer une vie pour se donner une dignité, une raison de continuer, d'avancer toujours plus loin.

Un soldat, un des clients de Slima, plus beau que les autres, sera pour eux, un temps, pour elle, le mari fantasmé, et, pour lui, l'homme à découvrir, le père, jusqu'à qu'il soit envoyé au front, ce front où le Maroc envoyait alors ses enfants mourir pour un bout de désert.

C'est alors la rupture : Slima est torturée et emprisonnée dans les sinistres geôles d'Hassan II ; lui, Jamal envoyé au Caire.

Les retrouvailles de la mère et du fils sont étonnantes. L'un et l'autre vont à travers une relation amoureuse être menés plus près de Dieu. Pour Slima, Dieu aura toujours été présent dans l'amour, dans tout amour et dans ce dernier amour qui lui est offert à la fin de sa vie. Jamal deviendra, par amour d'un garçon, un combattant de Dieu. En se faisant mourir lui-même, et d'autres aussi, croyant que la mort peut dire l'amour d'Allah.

Jamais, l'auteur n'avait à ce point parlé de Dieu et d'amour. En tout cas, comme cela.

Il y a, dans ce récit, tellement d'humanité, de fièvre, de rêve, d'amour, de Dieu (même quand il n'en est pas directement question) qu'il m'a plus d'une fois fait pleurer.

Je ne sais pas si vous aimerez, mais ce récit m'a bouleversé.





Pour plus de détails : http://www.terrafemina.com/culture/livres/articles/16908-rentree-litteraire-2012-abdellah-taia-l-infideles-r.html












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