On n'imagine pas à quel point la bêtise nous gouverne quotidiennement et injustement.
En voici trois exemples, tirés de mon expérience.
Ce matin, je me suis présenté à l'auto-sécurité. J'étais aussi stressé qu'un étudiant devant passer un examen. Mon garagiste avait fait un check-up général. J'étais paré. Tout était en ordre.Tout, sauf une chose. Une des deux ceintures de sécurité sur le siège arrière ne faisait pas clic, mais plop. Je n'aurais pas pu m'en apercevoir puisque je ne véhicule jamais de passager à l'arrière. Je suis recalé, a décrété l'examinateur. Je dois représenter le véhicule avant le 25 juin. Une faute aussi vénielle ne me paraît pas mériter une sanction aussi lourde. Voilà ce qu'il arrive quand on confie à des privés le soin de sanctionner les citoyens. Ils font du chiffre, puisque leur but est de se faire du pognon et accessoirement d'assurer la sécurité. Bref, je râle. Et qu'on ne vienne pas me dire que je râle sans raison.
Il y a quelque jours, c'était un dimanche ensoleillé, je devais franchir la rue de la Régence de la rive gauche à la rive droite, dirons-nous. J'empruntai un passage pour piétons. Le feu était rouge, mais il n'y avait aucun véhicule à l'horizon. Je n'avais pas vu qu'il y avait deux pandores en patrouille, dont une femme, une grosse blonde, qui doit compenser son manque de charme en jouant au gendarme. "Eh, vous là, vous ne savez pas attendre!". "Euh oui, moi, chère madame l'agente, excusez-moi, j'ai commis une faute, je n'aurais pas dû, pardonnez-moi". J'avais pourtant tellement envie de lui dire autre chose que je n'oserais exprimer ici et surtout d'exiger qu'elle me parle sur un autre ton. Si j'en avais eu le temps, et si j'avais été persuadé que son cerveau fût capable de l'entendre, je lui aurais développé la théorie suivante. Les feux qui gouvernent la circulation des piétons sur la voie publique n'ont pas pour fonction de les faire attendre, mais d'assurer une priorité entre les usagers. Quand deux usagers sont en présence, celui qui a le feu rouge doit céder la place à celui qui a le feu vert. Quand il n'y a qu'un seul usager, le feu ne sert plus à rien, puisqu'il n'y a pas de priorité à assurer. Comment faire comprendre cela à cette grosse blonde déguisée en policier? Pour elle, le feu rouge c'est fait pour faire attendre les piétons. Il va sans dire qu'avec une telle représentante ma méfiance vis-à-vis des forces de l'ordre s'est trouvée décuplée et ... que je ne me sens pas du tout en sécurité. Il devait sans doute y avoir des quotas imposés pour les recrutements à la police, autant de femmes et autant de blondes, comme dans les conseils d'administration désormais. Ca promet!
Mais la bêtise injuste peut tout aussi bien être masculine, rassurez-vous. J'ai connu l'épreuve du service militaire, à un âge (25 ans), où les ordres d'un caporal ou d'un sergent de 20 ans me paraissaient pouvoir être soumis à la critique. Les gamins de 17-18 ans, qui partageaient ma chambrée étant plus soumis que moi, ils se contentaient de protester par des batailles de pelochons. Bref, j'étais pour la seule fois dans ma vie, la forte tête dans un milieu où cela n'est pas bien vu. Avant d'obéir, j'aimais savoir pourquoi et posais donc des questions. Prenons un exemple de bêtise injuste. Une fois réveillés par le clairon, nous avions 15 minutes pour faire notre toilette, faire notre lit au carré et nettoyer la chambrée, horresco referens. Ceci était, par définition impossible, puisque tout était organisé pour que cela soit impossible. Il y avait moins d'éviers que de candidats à la toilette, moins de brosses pour balayer que de chambrées, etc. Après venait l'inspection par le premier sergent, dont le rôle était d'humilier, d'abaisser, de défaire les lits et de vider les armoires mal rangées. Il se murmurait qu'il était homo, ce qui ne m'étonnait pas du tout, mais jamais l'idée ne m'est venue de tenter ma chance auprès de lui. Ce n'est vraiment pas mon trip de me faire humilier. Avec le sergent, responsable du peloton, nous étions arrivés à un gentlemen's agreement. Il me faisait faire l'appel le matin parce que je savais lire les noms flamands, et puis il me foutait la paix; il me taquinait juste un peu sur mon ceinturon en disant qu'un ceinturon n'est pas une "ventrière". Comment ça, ventrière? Pfffttt
Dans ces circonstances où la bêtise prend le pas, jusqu'à se montrer injuste, j'ai toujours été un petit révolté qui ose à peine clamer sa révolte. Heureusement, il y a maintenant le blog!
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