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dimanche 5 juin 2011

Sermon peut-être un peu hérétique, mais allez savoir s'il ne dit pas vrai

Il a eu une étrange fin de vie, Jésus que l'on dit de Nazareth.

D'abord il a été crucifié, ce qui n'est pas banal, et, qui s'ajoute, dans son cas, à d'importantes tortures préliminaires plus pour ce qu'il représentait en tant qu'élément subversif pour les pouvoirs établis que pour ce qu'il disait. Une fois mis au tombeau, il en a disparu, le lendemain, laissant ses proches un peu perdus, perplexes et même incrédules.


Etait-il vraiment mort quand on l'a mis au tombeau? Après ce qu'il avait subi, on doute pourtant qu'il s'en soit allé tout seul, prenant soin de plier les linges qui l'entouraient avant de partir (Jn, 20, 6-7). D'autres que ses proches sont-ils intervenus, ayant constaté qu'il n'était pas vraiment mort, pour le conduire vers un médecin et lui permettre de survivre, ces hommes-là bravant peut-être la règle du shabbat? Et puis, nous dit-on, le tombeau était gardé (Mt, 27, 62 et suiv.). Ont-ils soudoyé les gardes? Qui cela pouvait-il être? Des notables juifs qui s'étaient opposés à la condamnation de Jésus ou un commando romain payé par l'épouse de Ponce-Pilate, qui était favorable à Jésus?


Pierre et Jean, ses deux plus proches, en tout cas n'en croient pas leurs yeux, ils sont totalement perturbés. Jean dit pourtant qu'ayant vu, il a cru (Jn, 20, 8). Permettez-moi une hypothèse: Jean s'est réjoui, parce que ne pouvant admettre que Jésus fût mort, lui qui était au pied de la croix et l'avait vu à l'agonie (Jn, 19, 25-27), il a été soudain envahi d'une grande allégresse: il n'était pas sûr que Jésus fût bien mort, maintenant il est sûr qu'il ne l'était pas. Le seul fait de découvrir le tombeau vide lui suffit: Jésus n'était pas mort, juste aux portes de la mort. Une absence, un vide, là où il attendait un cadavre, suffit à le convaincre.


Marie-Madeleine est, par rapport à Jean, dans un rapport très différent, alors qu'ils étaient sans doute les deux plus proches de Jésus d'un point de vue affectif et amoureux. On raconte qu'elle l'a vu et qu'il l'a appelée par son nom (Jn, 20, 11). Elle ne l'a pas reconnu cependant, elle l'a pris pour le jardinier. Il est possible que le jardinier, qui la connaissait peut-être de réputation, fût un sacré farceur profitant de la crédulité d'une belle dont le coeur était brisé. On imagine mal Jésus, dans son état, se déguiser en jardinier pour se présenter à elle et se faire reconnaître.


On ne connaîtra jamais le témoignage des deux gardes. Ils nous en auraient appris beaucoup pourtant.

Ce qui est plus troublant, c'est qu'après cette mise au tombeau, Jésus serait aussi "apparu" à d'autres disciples, même des durs-à-cuire, ceux à qui on ne la fait pas, comme Thomas, le jumeau. Et ce qui est frappant dans le récit de ces apparitions, c'est leur aspect incarné. Jésus n'apparaît pas à ses disciples comme la Vierge Marie à Bernadette Soubirou, à Lourdes, ou à Mariette Beco, à Banneux. Il mange du poisson avec eux au bord du lac (Jn, 21). Il se fait toucher par Thomas (Jn, 20, 24 et suiv.). Il partage le pain, et mange, avec les disciples d'Emmaüs (Lc, 24, 13 et suiv.). Comme pour leur dire: oui, c'est bien moi (Lc, 24, 39). Faut-il s'étonner, après tout ce que l'on a raconté de sa mort atroce, qu'ils soient encore un peu incrédules? Et puis, il disparaît. Arrêtons de penser à une espèce d'ectoplasme éthéré qui tout à coup se dissout. Quand Jésus disparaît, cela veut dire qu'il doit aller ailleurs, qu'il ne peut pas, ou ne peut plus, rester (cela peut fort bien se comprendre dans sa situation d'ex-condamné/crucifié amené à se cacher). Ils le prient: reste encore avec nous (Lc, 24, 29). Il doit s'en aller parce que cela pourrait devenir dangereux, même masqué ou déguisé. Jésus est devenu un clandestin. Les deux disciples d'Emmaüs ont raconté qu'après son départ, il était devenu invisible (Lc, 24, 31);  il n'y a point de mystère la-dessous, ils devaient effectivement être le moins visible possible. Le plus important est qu'ils l'avaient reconnu (Lc, 24, 31-32). 


D'après les évangiles, ces rencontres de Jésus avec ses disciples, après les événements de Jérusalem, ont été relativement peu nombreuses. Jésus n'avait guère le choix. Il était sans doute recherché.


Un jour, quarante jours après sa mort et sa prétendue résurrection, dit-on, il va expliquer à ses disciples, qu'il a réussi à rencontrer une fois encore, que dorénavant il ne pourra plus être physiquement avec eux, mais ailleurs. Au ciel? C'est ce qu'évoque spontanément le mot "ascension". Et s'il s'agissait d'un autre ailleurs? D'un défi plus grand encore que le ciel: je dois continuer ma mission ailleurs, continuer, avec les forces qui me restent, après toutes ces épreuves, à partager à d'autres que vous mes intuitions et ce que Dieu dit à mon coeur. Je ne puis plus rester ici, en cette terre où je suis né, ma vie serait perpétuellement en danger. Prenez maintenant ma place ici et autour de vous (Ac, 1, 8).

Déjà, par le passé, Jésus avait envoyé ses disciples sur les routes (Mt, 10, 5), ceux-ci se sentaient soutenus, car Jésus était derrière eux. Maintenant qu'il ne sera plus là, pour les soutenir et les mobiliser, en seront-ils encore capables?

Jésus leur fait alors une promesse (Ac, 1, 8): vous vivrez dorénavant de mon esprit. Je vous donne dix jours pour réfléchir à cela. Si vous acceptez de communier à mon esprit, je serai toujours avec vous. Au bout de ces dix jours de retraite, qu'ils ont vécue en communauté, ils n'avaient plus d'angoisse, ni de peur. Ils étaient prêts. Ce fut la Pentecôte (Ac, 2).


Quant à Jésus, il partit loin. Il avait donné tout de sa vie et, malgré toutes les souffrances subies, il était toujours vivant. On a dit qu'il aurait vécu la deuxième partie de sa vie en Inde, du côté de Shrinankhar. Si c'est vrai, cela me rend particulièrement heureux. 


Voyez-vous, moi, je crois plus en Jésus vivant qu'en Jésus ressuscité. Ses paroles me touchent et me rejoignent même ainsi davantage. Je préfère un Jésus vivant, intime de Dieu, qu'un Jésus, fils de Dieu, mort pour nos péchés et victime sacrificielle pour racheter le péché des hommes, du monde, et puis ressuscité. Ce qu'il n'a jamais prétendu être.


Pour moi être chrétien, c'est cela. Etre dans l'esprit d'un homme hors du commun pour atteindre, sur ses pas, l'intimité avec Dieu. Jésus, comme référence pour ma vie, c'est tellement de choses. Deux particulièrement, avant toutes les autres: tout peut être pardonné; tout est passage, rien n'est jamais figé, arrêté, il y a toujours un possible, un avenir. C'est ce message-là que les chrétiens ont à porter partout où il y a lieu de pardonner et d'ouvrir des portes. Quand on y réfléchit, cela est une tâche immense. Et puis, il y a tout le reste résumé dans les priorités des béatitudes.


Tout ce qui est advenu après l'intervention invasive de Saül de Tarse me parle moins. On ne saura jamais si Saül/Paul a un jour entendu Jésus dire les mots qui jaillissaient de son coeur. Etait-il là au Golgotha parmi les juifs haineux? Dans ses écrits, il ne cite jamais les paroles ou les actes de Jésus. Il parle beaucoup de lui-même et de ses voyages et élabore une théorie/théologie, sans se rendre compte au demeurant que ses moyens intellectuels  sont parfois limités et un peu confus. Il dit pourtant de temps en temps des choses inspirées. Ce qui était simple et parlait au coeur, en peu de mots, dans la bouche de Jésus, se noie avec lui dans une logorrhée souvent incompréhensible. Après sa fulgurante conversion, sur le chemin de Damas, il essaye de s'agréger aux disciples, mais ils ont peur de lui, n'arrivant pas à le croire vraiment disciple (Ac, 9, 26). Les frères et les témoins de la première heure, feront tout pour l'éloigner (Ac, 9, 30). Et quand il reviendra, ce sera pour s'opposer à eux et les déstabiliser.


Pourquoi avaient-ils ainsi peur de lui? Je ne vois qu'une explication: sa conversion subite ne les a pas convaincus. On aurait pu imaginer que Saül, revenu après sa conversion à de meilleurs sentiments, les interroge, demande à entendre leurs témoignages, leurs expériences avec Jésus, pour témoigner à son tour de ce que lui n'avait pas vécu. Or, il n'en est pas question. Il a eu l'illumination de la foi ... le genre de sentiment qui me rendra toujours méfiant. Lui n'a rien entendu, mais il a eu une révélation (Gal, 1, 12), comme le prophète Muhamad, quelques siècles plus tard. Il fondera toute son action sur cette prétendue révélation, bien plus que sur la transmission de l'expérience existentielle vécue par les disciples de Jésus.


On ne trouve, dans les écrits de Paul, aucune allusion aux béatitudes, aux paroles et aux actes libérateurs de Jésus. Et quand les évangiles seront écrits, bien après les lettres de Paul, aucun, même celui de Luc, qui, dans les Actes des apôtres évoque pourtant Saül/Paul, ne fait allusion à lui et à ce qu'il a écrit et répandu comme doctrine pendant les années qui ont précédé la rédaction des évangiles.


Depuis toujours, j'ai le sentiment qu'à partir de l'intervention de Saül/Paul, il y a eu deux christianismes, l'un fondé sur le témoignage, la mémoire, les paroles et les actes de Jésus, qu'il convient de faire vivre encore aujourd'hui, et un autre bien différent, et sans rapport avec le premier, qui a fini par se concrétiser, du moins je le pense, dans beaucoup de choses que je n'aime guère: luttes d'influences, controverses, expansion, morale, théologie, dogmatique, etc ... Il n'y a qu'à faire un tour du côté du Vatican pour voir le résultat. 


Je ne cesse depuis de chercher où mon christianisme à moi est vécu.

















































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