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mercredi 13 juin 2012

Dans mon quartier, je suis un immigré

J'habite le quartier d'Outremeuse, depuis un peu plus de 15 ans seulement. Je suis donc un immigré.

Avant, j'ai habité dans des lieux moins populaires, moins folkloriques, et fréquenté des quartiers, dont les noms évoquent un certain bucolisme :

- Grivegnée (là où il y avait des grives) ; ma mère est née à Grivegnée-bas, moi je suis né à l'hôpital et, quand je vois la tête de la chère soeur "sage-femme" - une mégère - qui m'a accouché, je me demande encore pourquoi je n'ai pas fait marche arrière ! Cela m'aurait peut-être évité bien des tourments. Après, j'ai passé mon enfance à Grivegnée-haut, c'était quand même plus chic. J'ai donc passé mon enfance, avenue (pas rue !) des Côteaux ;

- Chênée (là où se trouvait une forêt de chênes ... on a de la peine à y croire aujourd'hui).  Là, j'ai passé ma scolarité primaire à l'Institut Saint Joseph, l'école des garçons, juste à côté de l'école Sainte Thérèse d'Avila, l'école des filles, où ma mère enseignait. La mixité n'existait pas encore à l'époque. Je rejoignais ma mère à midi, dans sa classe, pour pique-niquer. Je m'amusais à écrire des bêtises au tableau noir, puis j'allais jouer avec les filles, dans la cour de récréation, avant de rejoindre mon école de garçons. J'étais le seul garçon au milieu de toutes les filles. Et on s'étonne aujourd'hui que ... Je dois avouer que cela m'arrangeait parfaitement. J'aurais dû sinon subir les matchs de foot et tous ces gamins excités qui cherchent toujours la bagarre, où j'aurais toujours été perdant. Horresco referens. Moi, j'aimais la marelle, la corde à sauter, les sauts à l'élastique et une rengaine, où on faisait une ronde :

"Au vert bocage, couvert de feuillage
Qui fleurira au  milieu des prés
Celle que j'aime n'est pas ici
L'amour esss ...trême ! Ah la voici!


REFRAIN


Ah ! la voici, la voici, la voilà, 
Celle que mon coeur aime
Ah ! la voici, la voici, la voilà
Celle que mon coeur aimera


Comme j'étais le seul garçon, parmi toutes les filles, j'étais potentiellement l'amoureux de toutes ... ce qui ne m'arrangeait pas plus que de devoir affronter les autres garçons dans l'école voisine. Quelle misère !

Après m'être amusé avec les filles, je revenais 3 minutes avant la fin de la récréation à l'école des garçons.

Là, comme j'étais le meilleur élève, je devais surveiller la classe en cas d'absence de l'instituteur ; il me gardait à la récréation pour écrire la dictée au tableau ; j'étais aussi l'adjoint du directeur, pour porter les plis et les courriers à chaque professeur, ce qui me dispensait de quelques moments de classe et rendait jaloux évidemment les plus paresseux, qui auraient tellement voulu être dispensés eux aussi. Et on se demande aujourd'hui pourquoi je ne me sens pas comme les autres et ai de la peine à me mêler aux autres ...

- Péville.  C'est là que, jeunes mariés, nous avons trouvé un petit appartement (la propriétaire, flamande de  Leuven, était irascible et intraitable : un chameau). Impeccable pourtant pour un jeune couple. Jolie vue et proximité du Parc des Oblats et du domaine de la Chartreuse. Nous avions, comme voisins d'étage, un jeune couple américain, en Belgique, pour les études du garçon, très sympathiques. A l'étage en dessous, une vieille grand-mère : madame Picalausa, discrète et gentille. A l'étage au-dessus, une autre dame seule qui, malgré son âge, manifestait beaucoup de tempérament. Elle recevait des hommes et était fan de Julio Iglesias. Alors entre les roucoulades de Julio à 2 heures du matin et les cris de plaisir de madame à 3 heures, nous n'avons plus été en mesure de résister. Nous avons décidé de vivre ailleurs.

- Bois-de-Breux. Avant Bois-de-Breux, il y eut une parenthèse, une maison pas très top, pour accueillir Samuel. Puis, le coup de coeur pour la maison de Bois-de-Breux. Grand route, mais aussi grand jardin et belle demeure où des transformations devaient être faites. Accueil de Benjamin. Puis j'ai dû laisser à un autre la réalisation de mes projets de transformation. Ce fut une expérience douloureuse. Bien entendu, parce qu'on ne recompose pas une famille sans certains états d'âme. Mais aussi, parce que pour la première fois, dans ma vie, j'ai été confronté au fait que l'argent n'a pas la même valeur pour tout le monde et qu'avec l'argent on peut beaucoup de choses. Je ne sais pas comment il faut qualifier ceux qui, pour réaliser leurs désirs, sont prêts à y mettre le prix.

Après cela, je me suis retrouvé Quai de Gaulle. Le côté résidentiel d'Outremeuse. Je l'ai déjà dit, ce quartier mélangé me plaît beaucoup (notamment parce qu'il y a beaucoup de jeunes, d'écoles, d'artistes). Le mélange a changé aussi : l'immigration a pris de la couleur. En même temps que moi, il y a eu les maghrébins, les sri-lankais et les bengalis (qu'on appelle souvent à tort les "pakis"), puis, les africains plus noirs que les autres, dont on ne connaît pas toujours l'origine et puis, plus récemment, des indiens.

Je trouve réjouissant, certains jours ensoleillés, de voir des femmes en boubou africain, d'autres en sari, d'autres encore voilées (je ne parle pas de burqa ou de niqab). Ces femmes sont belles dans leur habit traditionnel, qui leur va si bien. Elles sont même souvent plus belles que les nôtres ...

Je voudrais surtout partager une video portant sur mon quartier. Elle date de 1972 ! On y rencontre des figures emblématiques du quartier. Certaines vivent encore, d'autres plus. J'en connais beaucoup. Je vous invite à regarder cette video. Pensez notamment à frère Alfred (fondateur du parti vitaliste) et à papa Prosper (le dernier chanteur de rue du quartier), dont je me souviens. Immigré dans le quartier, je lui ai jeté plusieurs fois ma pièce du haut de mon balcon.

Dans cette video, vous entendrez aussi parler le vrai wallon de Liège.

http://www.youtube.com/watch?v=g-EDdhraqeE&feature=player_embedded









1 commentaire:

  1. Malheureusement, j'ai constaté que cette video est protégée par le droit d'auteur. J'ai pu la voir, mais je ne suis pas sûr que vous le pourrez.

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