Cette fois-ci, je suis tombé sur un livre en chinant dans les greniers de la demeure d'un ami. Comparé aux greniers de ma grand-mère qui étaient un modèle de rangement, celui-ci était un vrai foutoir.
J'ai toujours aimé les greniers, surtout celui de ma grand-mère, où il y avait trois espaces :
- l'espace bibliothèque, avec des livres d'auteurs, aujourd'hui inconnus, méconnus. Qui connaît encore Zénaïde Fleuriot ? Et qui a lu René Bazin ? On ne lit plus aujourd'hui André d'Hôtel, ni Maurice Genevoix ;
- l'espace où on faisait sécher le linge en hiver et où, dans des coffres, on gardait les vêtements d'été, plus des cartons à chapeaux et quelques ustensiles propices aux déguisements avec ma petite copine de l'époque (nous étions des enfants) ;
- l'espace odorant où on stockait les pommes du verger pour en consommer jusqu'à l'année suivante.
Ainsi, donc, dans le grenier de la demeure de mon ami, je suis tombé sur le livre d'un auteur florentin, qui m'était parfaitement inconnu : Histoire du Christ. Une histoire du Christ ... encore, allez vous me dire, tu ne lis plus que cela. J'ai choisi ce livre après avoir lu ce que l'auteur dit en exergue au lecteur.
" Depuis cinq cents ans, ceux qui se proclament " esprits libres " ... se donnent un mal fou pour assassiner une deuxième fois Jésus. Pour le tuer dans le coeur des hommes.
Dès qu'on eut l'impression que la seconde agonie du Christ en était aux avant-derniers râles, les nécrophores s'avancèrent. Des buffles présomptueux qui avaient pris les bibliothèques pour étables ; des cerveaux aérostatiques qui croyaient toucher le sommet du ciel en montant dans le ballon captif de la philosophie ; des professeurs mis en rut par de funestes cuites de philologie et de métaphysique prirent les armes comme autant de croisés - l'Homme le veut ! - contre la Croix. Certaines volières de balivernes montrèrent, clair comme le jour, avec une imagination qui ferait rougir de honte le célèbre Radcliffe, que l'histoire des Evangiles était une légende par laquelle on pouvait tout au plus reconstituer la vie naturelle de Jésus, qui fut pour un tiers prophète, pour un tiers nécromant et pour le dernier tiers agitateur ; et il ne fit point de miracles, à l'exception de la guérison hypnotique de quelques possédés, et il ne mourut pas sur la croix mais se réveilla dans le froid du tombeau et réapparut avec des airs mystérieux pour faire accroire qu'il était ressuscité ...
Mais, " après tout ce gâchis de temps et d'esprit et de talent, le Christ n'a toujours pas été expulsé de la terre ".
J'ai su d'emblée que j'aurai un certain plaisir à lire un homme qui écrit ainsi !
Qui était-il donc ?
Surprise : il s'est surtout illustré comme athée, plutôt iconoclaste et comme un avant-gardiste polémiste ... mais qui, à la surprise ou l'incrédulité de tous ceux qui le connaissaient, s'est converti à cause de l'incapacité de la Raison à éliminer le Christ ! Mais il n'est pas plus tendre avec les dévots : " les vies de Jésus destinées aux dévots exhalent presque toutes un je ne sais quoi de rance qui rebute, dès les premières pages, le lecteur accoutumé à des mets plus délicats et plus substantiels. Il y a un relent de chandelle éteinte, une puanteur d'encens refroidi et de méchante huile qui vous coupe le souffle ". Son projet est de se démarquer des uns autant que des autres.
Décidément, j'ai de plus en plus envie de lire ce livre ... et je passerai outre la proximité de l'auteur avec le fascisme montant.
Son livre, paru en 1921, a été traduit en de multiples langues (même le chinois, l'arabe et le maltais !) et ne cesse toujours aujourd'hui d'être réédité.
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