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jeudi 7 juin 2012

Le prix d'un taboulé

On a perdu l'habitude de convertir les euros en ancienne monnaie, en tout cas pour les achats courants. Hier, j'avais mis dans mon panier Carrefour une barquette de taboulé, sans m'interroger sur le prix. J'ai réalisé après qu'elle m'avait coûté 5,89 euros, soit pas loin de 250 francs ! J'ai du coup réalisé qu'une baguette industrielle (consommable dans les 4 heures) coûte 40 francs et une baguette artisanale, 48 francs. Que mon thé/café du matin coûte 80 francs par tasse ! Qu'un ticket de bus coûte aujourd'hui 68 francs.

Quand j'étais plus jeune, on achetait pour dix francs un pain de ménage d'un kilo qui durait quatre jours. On achetait un sachet de frites pour 5 francs. On roulait en bus (ou en trolleybus) pour 5 francs aussi. En plus, il y avait, à cette époque pas si lointaine tout de même, dans le bus, un conducteur et un percepteur. Ce dernier me donnait ce qu'il lui restait du carnet des billets. J'étais très fier, je jouais au percepteur après, d'autant que, vu mon âge, je roulais gratuitement, avec ma mère. A cette époque, on offrait des emplois même au moins qualifiés et les prix restaient à la portée de tous. On était alors à la fin des années 50, début des années 60.

Ma mère m'emmenait ainsi, en ville, tous les mercredis après-midi. Elle y faisait quelques emplettes (souvent au rayon mercerie et laines ... ma mère en effet cousait et tricotait pour me vêtir ... euh, bof). On s'arrêtait ensuite dans un salon de thé pour dames convenables. Il y en avait un, à l'époque, au sein même du Bon Marché, le grand magasin de l'époque. Je choisissais toujours des toasts grillés avec de la gelée de groseille. La serveuse était habillée en noir, avec un petit tablier blanc et une coiffe blanche dans les cheveux.

Aujourd'hui, beaucoup de prix sont devenus inabordables et il y a de moins en moins d'emplois disponibles. Il n'y a plus de percepteurs dans les bus. Il n'y a plus de pompistes. Il n'y a plus de serveuses habillées en noir avec un tablier blanc et une coiffe blanche. Il n'y a plus de guichetiers dans les banques que pour les affaires exceptionnelles ; pour le reste, vous devez vous débrouiller avec les distributeurs de billets ou avec le Net Banking, même quand vous avez 90 ans, comme mon père. Et j'en oublie sans doute.

Pourquoi ?

Ne me dites surtout pas qu'il s'agit d'un progrès !

J'ai bien ma petite idée, mais je crains qu'elle ne plaise pas. Et si tout cela était le résultat pitoyable du mythe de la croissance et de ses nombreuses dérives ? La croissance ne se mesure pas en effet à l'aune du bien-être des populations, d'ici ou d'ailleurs, mais au regard de la richesse produite. Toujours plus d'argent qui circule et toujours des riches de plus en plus riches. Comment expliquer, sinon par cette obsession de l'argent qui circule, cette hausse des prix ? Mais cet argent qui circule n'est-il pas pure illusion ? Peut-être, en crée-t-on, juste pour qu'il circule ? Je constate, en tout cas, que la croissance ne nourrit étonnamment pas les affamés, ni les exclus de notre terre.

Certes, me dira-t-on, le niveau de vie a augmenté dans de nombreuses parties du monde (en Chine, par exemple). Mais de quelle vie parle-t-on ? En ce qui me concerne, ce n'est pas en devenant consommateur de biens matériels que mon niveau de vie s'élève. L'élévation du niveau de vie ne devrait-elle pas porter avant tout sur l'éducation, la santé, le développement, l'autonomie alimentaire, l'indépendance économique, la spiritualité. Alors oui, on pourrait alors peut-être parler de progrès et de réelle croissance.









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