Je vis depuis bien longtemps avec pour compagne la dépression ou à tout le moins des états dépressifs. Socialement et professionnellement, ils constituent un handicap réel et sérieux. Mais qu'en dire, sur un plan individuel?
Voici quelques réflexions très personnelles:
- on finit avec le temps par apprivoiser cette compagne; on apprend à se dire qu'elle sera toujours là, malgré les anti-dépresseurs et l'écoute attentive de son psy;
- il arrive qu'on développe des réactions salutaires, c'est mon cas. La première, c'est de conserver la capacité à ne pas se prendre au sérieux, à pouvoir rire de soi. V.M., qui m'a accompagné pendant un temps, disait que je développais "une dépression souriante". La seconde consiste à se dire qu'après le creux de la vague, il y a toujours une crête. En ce qui me concerne, c'est toujours le cas;
- c'est pourtant dans le creux de la vague que je me sens le plus exister. C'est là en effet que je suis à nu, dépouillé de toutes les parures, de tous les masques, de toutes les illusions, simplement avec mes émotions, mon corps et mon coeur meurtris;
- les personnalités comme les miennes - on les appelle parfois "cyclothymiques" - ont de la peine à se faire entendre dans les milieux qui n'ont pour mot d'ordre que "excellence et performance". Soyons clair, je ne peux pas vivre sans arrêt à la crête de la vague. L'exiger de moi me détruit peu à peu. Car, pour moi, il ne peut y avoir de crête de la vague sans creux. Je le sais aujourd'hui. Et il ne faut pas s'étonner si le creux "se creuse" ou "s'allonge". Il le fait à la mesure des périodes où artificiellement j'ai dû me maintenir à la crête de la vague;
- ai-je moins de valeur qu'un "non-cyclothymique"? Si j'étais seul à devoir répondre, je dirais: "non ... et peut-être plus". Mais ce n'est pas à moi de le dire.
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Il y a 11 mois
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