La pire des choses est la résignation, une forme de soumission. La résignation est très répandue. Elle s'exprime, quand on vous dit, par exemple: "de toute façon, on ne peut pas faire autrement"; ou "il faut bien faire avec la crise et la mondialisation". A la résignation correspond un adjectif fréquemment utilisé par les résignés: de toute façon, c'est incontournable. Les apôtres de la résignation ne méritent guère d'être suivis. Parfois, ils sont un peu suspects, voire intéressés. Il est possible que se résigner les arrange.
L'indignation, c'est d'abord un refus et puis, dans le cas des "indignés résistants" une action.
Il ne peut y avoir des résignés et des indignés sans un conflit portant sur les valeurs: les valeurs dominantes (généralement fausses) et les vraies valeurs (censées être plus vraies). Ceci est quand même fort important! A quelles valeurs sommes-nous attachés? Quelles valeurs défendons-nous?
A chacun de les définir et de les situer. Je sais quelles sont les miennes.
Bien entendu, il y aura toujours de mauvais esprits pour reprocher à une initiative individuelle, comme celle-ci, des tas de choses. C'est le droit des mauvais esprits. Est-il si important de dénoncer les références à la résistance liée à la seconde guerre mondiale? Ou de relever un sentiment un peu trop pro-palestinien?
On peut reprocher aussi à l'auteur une forme de populisme. Ne joue-t-il pas sur l'émotion? L'indignation serait-elle le seul moteur de l'action politique?
L'essentiel se trouve dans les questions posées:
- la place donnée par les politiques à l'intérêt général de moins en moins et aux intérêts particuliers (parfois même les leurs) de plus en plus;
- la place de l'argent dans la société;
- l'uniformisation des modes de consommation, de la culture même;
- la concurrence et la compétition comme modèles;
- la place tenue par la violence dans la résolution des conflits;
- le poids des idéologies religieuses ou non religieuses.
Ce n'est pas très original? Sans doute, mais cela méritait d'être dit. Et de nombreux lecteurs doivent être heureux qu'un autre l'ait dit pour eux. Qu'en feront-ils? On peut être pessimiste ou optimiste. Au pire, ils s'endormiront avec le sentiment d'avoir été enfin compris. Au mieux, ils se réveilleront et trouveront de quoi orienter leur action.
J'ai été confronté, dans le milieu professionnel qui a été le mien, à ce dilemme "indignation/résignation". C'était lors des réformes imposées par le processus dit de Bologne. Un certain nombre de choses me paraissaient devoir être dénoncées. Mes observations, qui recueillaient l'assentiment d'un certain nombre de collègues, qui n'osaient le dire, se sont heurtées de manière constante aux arguments suivants: "de toute façon, on ne peut pas faire autrement", "ton combat est d'arrière-garde", "le recteur veut qu'on avance, pas qu'on réfléchisse, les décisions viennent d'en haut".
Je me réjouis donc de voir un collectif de collègues encore en fonction et venant de toutes les universités francophones avoir malgré tout une capacité d'indignation.
http://www.lalibre.be/debats/opinions/article/634005/comment-le-management-gangrene-les-unifs.html
Je précise que, dans l'édition papier de la Libre Belgique, les professeurs qui ont signé ce texte sont nommément cités.
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