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mardi 11 janvier 2011

L'université de Waterloo

Dans le n° 2406 du Nouvel observateur (16 au 22 décembre 2010), on peut lire un intéressant article de Patrick Fauconnier intitulé "Le modèle Waterloo - Quand l'entreprise et l'université entrent en symbiose".

L'université de Waterloo, au Canada,  ne figure dans aucun des rankings tellement en vogue en ces temps de concurrence effrénée entre les universités, ni celui de Shangaï, ni celui du Times magazine. L'université de Waterloo compte 30.000 étudiants et se situe à proximité de la ville de Kitchener, une ville de la taille d'Orléans en France, à une heure de Toronto, capitale de la province de l'Ontario, la plus grande ville du Canada. Elle n'est pas et ne sera jamais ni Harvard, ni Cambridge. Vue ainsi, elle présente certaines similitudes avec l'Université de Liège.

L'Université de Liège compte un peu plus de 20.000 étudiants. Elle a son siège dans une ville de taille moyenne, 190.000 habitants en 2008 (205.000 habitants pour Kitchener). Elle ne figure en ordre utile dans aucun ranking, ce qui ne veut pas dire qu'elle ne soit pas à la hauteur et ne comporte pas des secteurs d'excellence. Liège est à moins d'une heure de Bruxelles, capitale de la Belgique, mais aussi siège des principales institutions de l'Union européenne, et à deux heures de Paris. L'Université de Liège comporte une particularité que n'a pas l'Université de Waterloo. Liège se situe dans un triangle géographique à la frontière de trois Etats européens. Trois villes (Liège, Maastricht, Aachen) y sont distantes l'une de l'autre d'une trentaine de kilomètres. Dans ces trois villes, on trouve une université, tantôt complète (comme à Liège), tantôt partielle (comme à Maastricht et à Aachen). Certes, les langues pratiquées dans ces trois pays ne sont pas les mêmes, mais je ne comprends toujours pas, même si des partenariats existent, qu'il n'ait pas été possible de créer un pôle universitaire européen, unique et régional, au-delà de ces trois frontières. Voilà ce qu'on était en droit d'attendre du processus de Bologne.

Depuis 50 ans, l'Université de Waterloo utilise, pour son financement, un partenariat avec des entreprises liées plus ou moins étroitement à l'institution. Toutes les universités ont plus ou moins recours à cela aujourd'hui, vu la carence des pouvoirs publics en terme de financement de l'enseignement et de la recherche. L'Université de Liège aussi, depuis moins longtemps toutefois. Deux réticences s'exprimaient:
- un financement privé ne risque-t-il pas de compromettre l'indépendance de la recherche universitaire?
- si chaque secteur de la recherche universitaire doit, pour subsister, trouver des financements privés extérieurs, ne risque-t-on pas de voir s'éteindre la recherche dans les disciplines peu rentables? Et, par conséquent, un certain savoir. Une réponse existe évidemment: les sciences exactes plus lucratives doivent aider à financer les sciences humaines, où le savoir est moins sujet à brevet et à création d'entreprises.

A l'Université de Waterloo, cette politique a été payante, non seulement, elle attire des étudiants, mais elle attire aussi des professeurs de très grand format. Elle est à l'origine d'un réseau d'entreprises de haut niveau dans tout ce qui touche au high tech. 


Ce que je trouve intéressant, dans le projet de l'Université de Waterloo, se résume à deux choses:
- tout d'abord, l'impulsion donnée à de jeunes inventifs, avant même parfois qu'ils n'aient obtenu leur diplôme. Ceux-ci deviennent les mécènes de demain;
- le pari fait que la valeur d'une université ne se mesure peut-être pas au volume des écrits publiés par ses professeurs et chercheurs, mais aux réalisations de ses étudiants. Ceci me paraît fort important et fort méconnu.

Ayant peu publié, je puis affirmer être extrêmement touché, moi le professeur d'université un peu local, quand d'anciens étudiants, qui font aujourd'hui carrière à Genève, à Vancouver, à Luxembourg, ou ailleurs, me disent: c'est un peu grâce à vous, si je suis là aujourd'hui. Comme quoi, le professeur ne doit pas nécessairement avoir une stature internationale pour faire du bon travail.

Je ne perdrai cependant jamais de vue que tous les étudiants ne sont pas appelés à un grand destin et que former aussi de bons étudiants, fiables, rigoureux est aussi une des missions de l'université et que cela a toujours compté, pour moi, autant, sinon plus que la promotion des plus doués.

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