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samedi 20 octobre 2012

A gauche et à droite

Je vais décevoir sans doute tous ceux qui, suite à cet intitulé, attendent un commentaire à propos des dernières élections.

L'évangile de ce dimanche (Mc, 10, 35-45) commence par deux requêtes : "Nous voudrions que tu exauces notre demande" et "Accorde-nous de siéger, l'un à ta droite, l'autre à ta gauche". Ces deux requêtes sont formulées par Jacques et Jean, les fils de Zébédée. On les appelait "fils du tonnerre", "Boarneges".

Quelques informations contextuelles :
- les fils de Zébédée viennent d'une famille plutôt aisée, leur père a créé une entreprise de pêche florissante, dans laquelle il emploie des ouvriers ;
- Pierre, lui, est un petit patron pêcheur travaillant pour son compte ; il semble pourtant, aux yeux de Jésus, appelé à être le leader du groupe des disciples, et celui en qui Jésus met sa confiance pour l'avenir (Mt, 16, 18-19);
- le récit se situe lors de la lente montée de Jésus vers Jérusalem, où il n'arrête pas de prévenir ses disciples de ce qu'il pressent : "Le fils de l'homme va être livré aux mains des hommes et ils le tueront ..." (Mc, 9, 31). Les disciples semblent ne pas bien identifier le "fils de l'homme", dont parle Jésus. Marc ajoute aux propos de Jésus (mais Jésus a-t-il jamais dit cela ?) une finale, qui, si elle a été dite, n'aura fait qu'ajouter à l'incompréhension : "lorsque le fils de l'homme aura été tué, trois jours après il ressuscitera".

Deux constatations :
- Jésus a beau leur annoncer le pire pour les jours à venir, les disciples n'arrivent pas à y croire, leurs préoccupations sont totalement déconnectées de ce que Jésus leur dit. Déjà, un peu auparavant, ils se disputaient pour savoir qui, parmi eux, était le plus grand (Mc, 9, 33-37). Voilà aujourd'hui deux d'entre eux qui lui demandent rien moins que d'être associés à sa gloire en étant assis l'un à sa gauche, l'autre à sa droite. Ils demandent TOUT ;
- cette demande n'émane pas de n'importe qui. Les fils de Zébédée sont, comme on dirait aujourd'hui, des fils de bonne famille, des enfants "bien nés", non à cause de leurs vertus particulières, mais parce que leur père a réussi en affaires et fait fortune.

A partir de là, on peut imaginer bien des choses. Notamment, une révolte et une manoeuvre des fils "bien nés" pour supplanter Pierre. L'ordre des choses n'impose-t-il pas que le leadership soit réservé à ceux qui pèsent d'un certain poids dans la société ? Que vient faire Pierre, le petit patron pêcheur, dans l'organigramme ? L'arrogance des fils "bien nés" suscitera de l'indignation chez les autres apôtres (Mc, 10, 41).

Il y a beaucoup d'orgueil dans les propos des fils de Zébédée. D'abord, ils abordent Jésus sur un mode bien particulier : "Nous voudrions que ...". Ils n'interrogent pas Jésus, sur ce que lui veut. C'est leur  volonté qu'ils expriment et imposent comme commencement du débat. Et, quand Jésus leur répond : la gloire? à mes côtés? "Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire à la coupe que je vais boire , recevoir le baptême dans lequel je vais être plongé ? " (Mc, 10, 38). Ils répondent, sans rien comprendre : "Nous le pouvons" (Mc, 10, 39). Drôle de dialogue, n'est-il pas ?

La réponse de Jésus, comme souvent, va les remettre à leur place. Il ne m'appartient pas de décider qui siégera à ma gauche et à ma droite, leur dira Jésus (Mc, 10, 40). Bref, non seulement vous ne posez pas la bonne question, mais, en plus, vous ne l'adressez pas au bon interlocuteur ! Ce n'est pas la bonne question en effet. Point de gauche ni de droite, point de premier ni de dernier, auprès du Dieu-Père dont Jésus se veut le témoin.

Jésus, que ces querelles de pouvoir devaient lasser, aurait dit, selon Marc : "Ceux qu'on regarde comme les chefs des nations les tiennent sous leur pouvoir et les grands (les tiennent) sous leur domination. Il ne doit pas en être ainsi parmi vous ... Si quelqu'un veut être grand parmi vous, qu'il soit votre serviteur. Et si quelqu'un veut être le premier parmi vous, qu'il soit l'esclave de tous " (Mc, 10, 42-43).

Les évangiles seraient lettre morte s'ils ne nous confrontaient sans cesse aux réactions les plus humaines. A chacun d'actualiser le texte et l'éclairage que j'en ai donné, mon rôle s'arrête là.




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