Omar est venu m'aider à faire le grand nettoyage ce matin.
Il est originaire de Guinée (Conakry), il est arrivé en Belgique, après un passage en France. Il n'aime pas la France, ni les français. Il a des papiers pour trois mois, son dossier de demandeur d'asile est en cours, mais ses chances sont très minces de pouvoir rester en Belgique et d'avoir un permis de travail. Il ne mendiait pas, quand je l'ai rencontré. Il proposait des DVD, bien entendu pas très légaux, contre un peu d'argent, question de dignité. Je préfère encore cela aux nombreux mendiants et leurs chiens, souvent belges, qui, sans rien vous offrir, vous demandent une petite pièce. Je lui ai acheté un DVD que je n'ai bien entendu pas regardé, mon fils Sam, si. Je l'ai invité à boire un verre et à me raconter un peu sa vie. Sam, dans ce genre de circonstances, a toujours l'air de m'en vouloir. Il ne comprend pas comment je peux offrir un verre ou un café à un étranger inconnu. Ne l'était-il pas, quand je l'ai accueilli comme fils?
J'ai revu Omar quelques jours après. Je suis son premier ami belge. Et j'ai assisté en direct à la nouvelle: on l'appelait de Guinée pour lui annoncer qu'il était papa d'une petite fille. Imaginez-vous à sa place! Alors, son seul ami belge a été prié de parler à presque toute la très nombreuse famille ... pour se réjouir avec eux. Des photos arriveront dans quelques jours. La Guinée est trop lointaine pour envoyer des SMS ou des photos avec son portable et, pour avoir accès à internet, il faut aller à Conakry, à 80 km du village où vit sa famille.
Omar m'aide aujourd'hui à faire le grand nettoyage de mon appartement. Rien ne l'arrête. C'est une fée du logis.
Nous avions, mes fils et moi, surnommé entre nous, mon ancienne femme de ménage Bertha, alors qu'elle s'appelait Christine et que je persistais à l'appeler, dans une espèce d'oubli récurrent, Sabine. Bertha, à cause de la "Grosse Bertha". Bertha/Christine était un as du plumeau et de l'aspirateur. Elle garantissait à mon logis, d'homme encore en activité, un semblant de propreté, mais il ne fallait pas aller dans les coins, ni espérer de grands chantiers. Bertha/Christine ne prenait pas de risques: elle devait faire attention à son dos, ne pas trop se pencher, ne pas trop s'étirer; bref, elle parlait beaucoup de ses enfants et faisait ce qu'elle peut, c'est-à-dire peu.
Omar qui est petit (165cm), musclé, agile, travailleur et consciencieux est en train de donner un coup de frais à mon appartement. Il a escaladé avec une agilité peu commune le balcon pour atteindre les zones que je croyais impossibles à atteindre de mes fenêtres en façade. Un moment, j'ai redouté qu'il ne saute dans la corniche du voisin pour avoir un meilleur accès au quart droit supérieur de la vitre, inaccessible à tout être normalement constitué, sauf lui (merci l'architecte!). Pour le moment, il déplace la cuisinière - la gazinière comme disent plus justement mes cousins bretons - et on en découvre des choses derrière une gazinière! Rien ne l'arrête, ça "blingue", ça sent le propre et ça reluit.
Moi, j'ai fait les bois. Cire d'abeille sur tous les meubles de famille. J'adore, cela sent tellement bon. Tout cela sur fond de musique africaine (nous avons branché le lecteur MP3 de Omar sur ma chaîne stéréo).
Je vais suggérer que l'on revoie complètement l'image de "Monsieur propre"... je détiens le challenger!
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Il y a 11 mois